Un besoin de réconfort

Aurelia était dans la chambre à essayer d’établir un quelconque moyen d’essayer de convaincre ses parents d’alléger son « emprisonnement ». Depuis qu’ils avaient découvert qu’elle était loin de rester à la maison et qu’elle partait souvent se rendre dans le vieux Boston au milieu des monstres et des créatures qui traînaient là-bas ils avaient décidé de prendre de sévères mesures pour ne plus la laisser aller à sa guise dans un endroit où il pourrait la perdre. Elle savait qu’elle n’aurait jamais dû se faire découvrir si Zachary et elle, n’avaient pas fait de fâcheuse rencontre dans le no man’s land. Elle ne pouvait pas imagier que c’était si dangereux. Elle avait toujours quitté la demeure familiale très tôt le matin pour se rendre à la vieille balançoire pour écrire en toute liberté ces lettres, son passe-temps secret. Evidemment, elle ne regrettait pas d’avoir rencontré Zachary. Elle n’avait que peu d’amis et il pouvait se compter sur les doigts de la main : Illaria et Juliet. Aucun garçon ne l’avait approché. Il faut dire aussi qu’elle sortait très rarement de la maison. Ces parents étaient du genre protecteur. Ils n’étaient pas méchants mais ils couvaient Aurelia de nombreux conseils et d’une protection constante. C’était étouffant et la jeune sorcière souffrait depuis des années de ce fait.

Cependant, elle devait avouer qu’elle voulait être la jeune femme parfaite aux yeux de sa famille. Leurs jugements avaient de l’importance pour elle. Les décevoir lui causait toujours une peine immense. Elle se sentait mal et était donc plus incline à perdre le contrôle face à une de ses personnalités multiples. Evidemment c’était le plus souvent Cecily qui apparaissait et c’était toujours une histoire quand quelqu’un de sa famille tombait sur une de ses personnalités. Le plus souvent, ils n’écoutaient rien et partait chercher la potion afin de l’ingérer de force à leur fille afin qu’elle redevienne maitresse de son corps. Souvent après un de ses épisodes, elle allait s’enfermer dans sa chambre avec un livre et un pot de glace à la vanille. La glace c’était son péché mignon. Il lui fallait bien ça, car sa mère n’hésitait jamais à débarqué dans sa chambre pour lui reprocher de ne pas faire d’effort pour contrer ses personnalités et de méditer davantage. Elle avait beau essayer ce n’était jamais ça et cela la rendait malheureuse de les décevoir. Aurelia se trouvait terriblement nulle de n’être bonne qu’à connaitre des noms de plantes et les bonnes manières en société (qu’elle ne fréquentait jamais).

Mais depuis sa rencontre avec Zachary, elle avait envie de voir plus que ce qu’on lui avait offert jusque-là. Elle se questionnait et questionnait son existence. Elle ne savait toujours pas si elle trouverait une issue et un chemin à suivre. Parfois, elle voulait tout abandonner et se laisser aller. D’autres fois, elle pleurait et voulait rester. Mais il n’y avait jamais de choix définitif. Ilaria la prenait telle qu’elle était est pour cela elle était reconnaissante. Quand à Juliet, cette dernière, la conseillait de se laisser aller et d’embrasser sa différence. Mais elle hésitait toujours. Parfois la sorcière avait l’impression d’être sur un chemin à deux branchements et de rester à la croisée des deux sans jamais avancer. Si jamais elle avançait ce n’était que d’un pas hésitant et jamais elle ne franchissait la barrière et prenait un chemin en particulier. C’était terriblement difficile de faire un choix. Elle savait que ça changerait toute sa vie et elle n’était pas encore prête pour ça. Bien sûr, ses parents avaient choisi un chemin pour elle : atteindre les vingt-deux ans et épouser son frère ainé. Aurelia n’était pas certaine de le vouloir. Elle avait tant de mal à imaginer cet avenir là et préférait porter des œillères à ce sujet et prétendre que ça n’arriverait pas si vite. Mais elle avait déjà vingt-un ans et l’année prochaine n’était pas si loin que ça.

Penser à son grand frère était plus souvent source de réconfort que d’inquiétude. Elle savait qu’Ulrich se plierait à la décision de leurs parents. Il ne voyait rien à redire à cette situation. Il est vrai que s’il n’était pas son frère elle-même n’aurait pas eu tant d’hésitation. Il était bon avec elle et même s’il avait désapprouvé ses escapades (ce qui d’ailleurs lui avait fait plus de mal que celle de ses parents), il avait toujours accordé du temps à sa jeune sœur. Les enfants Jenkins étaient très soudés malgré leurs différences. Aurelia n’aurait pu souhaiter de meilleurs frère et sœur. Ulrich avait été un roc pour elle plus d’une fois et Faith une confidente. Elle les aimait et les enviait à la fois. Ils ne se posaient pas de questions, ils avaient un travail qui les passionnait, ils soutenaient les mages fondateurs sans concessions et n’avaient plus à répondre à leurs parents.

« Tu devrais peut-être les imiter. » entendit-elle dans sa tête. C’était la voix mauvaise de Cecily qui n’était jamais loin quand elle était si vulnérable.

Elle se redressa sur son lit. Cette voix était la plus irritante de toute son existence. Même la voix de son père ne pouvait l’atteindre de cette façon si personnelle. Cecily connaissait tous ces secrets. C’était sa jumelle maléfique et son double permanant. Si Aurelia était le Ying, Cecily était son Yang. La seule manière de se débarrasser d’elle était d’ingérer la potion qu’un guérisseur avait mise au point pour lui permettre de vivre une existence normale. Elle fouilla dans le tiroir de sa table de chevet pour trouver un flacon de cette potion mais elle avait oublié d’en remettre un. Elle commença à respirer fort. C’était toujours comme ça. Elle espérait qu’il s’en trouvait dans la cuisine. Dans sa tête, Cecily riait d’un rire méchant. Elle se jouait d’elle.

« Déjà envie de se débarrasser de moi ? Je viens à peine d'arriver et  tu sais bien que nous ne nous quitterons jamais. Nous serons toujours liées »

Aurelia se releva et descendit du lit. Il fallait qu’elle respire lentement et qu’elle  essaie de vider son esprit tout en se dirigeant vers la cuisine. Ce n’était pas une chose aisée. Il est d’autant plus difficile de vider son esprit quand vous entendez des voix moqueuses qui raillent vos moindres efforts pour tenter de le faire. Il n’y avait que Cecily pour faire cela. Ses autres personnalités n’étaient pas encore apparues. Dans son esprit, Aurelia visualisait une sorte de porte qui parfois s’entrouvrait pour laisser passer la voix d’une de ses personnalités. Si elle n’y prenait pas garde et n’arrivait pas à reprendre le contrôle, la porte s’ouvrait et son esprit tombait dans un couloir sombre qui était le lieu qu’elle imaginait être la place de ses personnalités. L’une d’entre elle alors prendrait le chemin dans l’autre sens vers la lumière qui représentait le contrôle de son corps. C’était une image bien sûr mais elle ressentait tout cela de cette manière. La sorcière sentait qu’elle n’y arriverait pas. Elle ne voulait pas laisser Cecily la contrôle : pas aujourd’hui.

« Cesse donc de te lamenter. Mais quelle pleurnicheuse ! Je ferai un meilleur usage de ton corps. Toi et moi le savons. De plus je pourrais enfin faire avancer les choses comme je le souhaite. » se plaignit Cecily

Aurelia savait ce que voulait Cecily. Aujourd’hui, Ulrich devait passer à la maison. Cecily serait plus que ravie si elle pouvait mettre la main sur le corps de Aurelia et faire en sorte de tomber dans les bras de son grand frère. Cecily ne voyait aucun inconvénient à un mariage avec Ulrich. Au contraire, elle en était plus que désireuse. De ça mais aussi de ce que laisser entendre l’idée d’un mariage. Une relation charnelle avec son frère ne lui posait pas de soucis. Elle avait plus qu’envie de laisser tomber l’attente et de passer à l’action. Son seul problème c’était qu’Aurelia ne lui avait jamais donné l’occasion d’arriver à faire quoique ce soit en présence d’Ulrich. La sorcière se sentait en confiance avec son frère. Elle savait qu’il prenait soin d’elle à sa manière et elle le lui rendait bien mais c’était son frère avant tout. Elle n’arrivait pas à imaginer l’épouser alors l’embrasser, le toucher comme une femme le fait avec son amant et partager son lit, cela elle ne pouvait l’envisager.

« Quelle prude tu fais ! Je suis sûr que ça te plairais et ça comblerait ton inexpérience flagrante dans ce domaine. »

Aurelia ne voulait plus entendre sa voix. Elle courut jusqu’à la cuisine alors même qu’elle sentait que la porte de son esprit s’ouvrait de plus en plus. Elle se dépêchait comme si elle courrait après le temps. Heureusement pour elle la chance lui souriait. Sur le plan de travail trônait quelques flacons que sa mère avait dû préparer dans la matinée. Dans son esprit elle pouvait entendre Cecil vociférer. Elle prit un des flacons et le déboucha, elle pouvait presque sentir son esprit la quitter. Derrière la porte de son esprit, Cecily courrait pour atteindre la lumière mais elle ne l’atteignit jamais car Aurelia but la potion qui fit se fermer la porte dans un grand claquement et vida son esprit des menaces de Cecily. Aurelia l’avait échappé belle et elle le savait. Elle n’osait imaginer ce qui se serait passé si Cecily avait était face à Ulrich. Aurait-il remarqué qu’elle n’était pas elle-même ? La jeune femme avait envie de pleurer. Elle ne comprenait pas pourquoi elle devait subir ça. C’était de plus en plus dur de se débarrasser de ses personnalités. Elles revenaient toujours plus vite. Les effets de la potion étaient de moins en moins efficaces.

Que deviendrait-elle quand la potion ne serait plus suffisante ? Il semblait ne pas y avoir un moyen de se débarrasser de ce handicap qui lui rendait la vie infernale. Elle se traina et alla chercher un pot de glace avant de s’assoir sur la table et de contempler le pot comme s’il pouvait lui fournir la réponse. Mais la glace n’a pas se pouvoir par contre une bouché de ce délice sucré et glacé pouvait l’aider à oublier. L’elfe de maison la regarda avec un air navré. Même les elfes de maison avaient pitié d’elle. Il y avait de quoi se sentir misérable. Aurelia était jalouse de ses amies qui ne semblaient pas faire face au problème qui était le sien. Elle se demandait ce qu’aurait été sa vie sans ce problème. Peut-être que cela aurait été plus simple. La glace fondait sur son palais et lui apportait un certain réconfort. Il y aurait toujours le sucre pour l’aider même quand elle était au trente sixième dessous. En cet instant présent, Aurelia aurait bien voulu que quelqu’un la sert dans ses bras et lui disent que rien n’était grave. Mais elle avait déçu tous les membres de sa famille avec son escapade. Elle n’était pas certaine que l’un d’entre eux ait des paroles réconfortantes à lui adresser. Même Faith lui avait fait des reproches alors qu’elle était la plus diplomate de la famille. L’horloge dans le salon sonna quatre heures. Aurelia se demanda si Ulrich allait vraiment venir aujourd’hui.

Un besoin de réconfort

w/ Aurelia

Pour Ulrich, la vie s'était résumée à une succession de réussite, et c'était probablement encore vrai. Il menait une vie bien tranquille qu'il menait comme il le souhaitait, tout en continuant d'être la fierté de ses parents, et bien qu'il ne se souciait pas spécialement des années à venir, elles semblaient sûres et toutes tracées ; aucune inquiétude à se faire, et surtout à son âge. Il avait réussi à faire ce qu'il souhaitait et c'était ce qui comptait pour Ulrich. Il menait sa vie sans se soucier des autres et se préoccupait peu de ce qui pouvait se passer autour de lui. Même les évènements importants ne l'étaient pas tant pour lui, tant que cela ne touchait pas directement sa famille, vous le verrez souvent hausser des épaules lorsqu'il apprend une quelconque nouvelle sur telle ou telle personne. Par contre, il suffisait que quelque chose arrive à un membre de sa famille pour que sa réaction soit différente.

Il se souciait souvent des escapades de sa sœur et des conséquences que cela pouvait avoir, bien qu'il n'en parle véritablement jamais avec elle. Mais tant que cela restait relativement contrôlable, il ne s'en faisait au final pas vraiment, tout simplement parce que tant qu'il ne lui arrivait rien, tout allait bien. Cependant, il avait eu vent de sa dernière escapade et cela lui avait beaucoup moins plus qu'à l'habitude. De ce qu'il avait compris, lors de cette escapade elle avait croisé le chemin d'un jeune homme avec qui elle avait discuté. Le problème ? D'une, il n'avait pas vraiment les valeurs partagées par les Mages Fondateurs. Déjà qu'il avait souvent des échos de ses parents d'à quel point sa sœur pouvait parfois les désespérer ; il prenait d'ailleurs souvent sa défense dans ces moments-là, leur disant de relativiser et qu'après tout elle était encore jeune. C'était vrai après tout et elle avait encore le temps de prendre de véritables décisions. Ensuite ? La simple raison que c'était un homme était aussi assez conséquente. Pas qu'Ulrich soit extrêmement possessif, là n'était pas la question – il n'y avait d'ailleurs jamais prêté attention car jusque là ses parents faisaient tout leur possible pour qu'elle en fréquente le moins possible – c'était justement que cela plaisait encore moins à ses parents. Bien sûr, Ulrich n'apprécierait pas vraiment qu'elle aille voir ailleurs (alors que c'était ce qu'il faisait, et il ne s'en privait pas), mais il ne pensait pas non plus que le premier garçon venu suffirait à lui faire perdre la tête.

Il connaissait très bien sa sœur et il appréciait d'ailleurs cette proximité qu'ils avaient. Bien qu'elle lui soit promise et qu'ils allaient se marier après son prochain anniversaire, il ne ferait un pas en avant que si elle le voulait. Faire du mal à sa sœur était quelque chose qu'il n'envisageait absolument pas et il n'oserait jamais la contrarier. Bien sûr, comme tous les frères et sœurs ils avaient eu leurs différends de temps à autres, mais cela ne durait jamais bien longtemps. Il avait toujours apprécié cette simplicité qu'ils partageaient l'un avec l'autre et voir sa sœur sourire était ce qui comptait. Il était du genre protecteur et c'était souvent pour cela qu'il ne savait parfois pas trop de quel pied danser lorsque ses parents lui racontaient les reproches qu'ils pouvaient faire à sa sœur. Elle avait toujours été adorable avec lui et cela expliquait donc que même auprès de ses parents il ressentait le besoin de lui trouver des excuses.

Aujourd'hui, il devait passer à la résidence Jenkins mais il ne savait pas exactement ce qu'il pourrait dire ou faire. Il tomberait sûrement sur Aurelia, mais que pourrait-il bien lui dire ? Même si sa dernière escapade lui avait déplu, il n'allait pas lui hurler dessus – ses parents l'avaient probablement bien assez fait et il ne voulait pas en rajouter une couche. Cependant, il doutait qu'il réussisse à avoir un comportement 'normal' et cela dépendait aussi des circonstances... Alors qu'il cogitait tout en réorganisant quelques produits dans sa boutique, il finit par regarder l'heure ; bientôt quatre heures. Il fallait qu'il songe à se changer avant de se rendre à la demeure familiale sans qu'il n'arrive à une heure un peu trop tardive. Il décidait donc de fermer sa boutique – l'avantage d'être son propre patron, on pouvait exceptionnellement quitter son travail plus tôt et cela ne dérangerait que les clients – se changeant rapidement une fois chez lui, enfilant des habits moins conventionnels et plus détendus avant de transplaner près de la maison où il avait passé toute son enfance.

Il frappa deux légers coups à la porte avant d'entrer sans particulièrement attendre de réponse ; c'était plus pour signaler son arrivée qu'autre chose. Entendant un peu de bruit venant de la cuisine, il s'y avança, trouvant rapidement sa sœur assise en train de manger un pot de glace. Souriant d'une manière qu'il ne saurait lui-même pas vraiment interpréter, il ouvra un des tiroirs, s'emparant d'une cuillère avant de s'asseoir à ses côtés, se servant de la glace qu'il savoura avant de finalement prendre la parole.

« Si tu sors un si grand pot, j'espère que tu prévoyais au moins de partager. Sinon, tu t'en voudras plus tard si tu le finis seule. »

C'était un peu loin de ce qu'il aurait pu imaginer lui dire, mais, alors qu'il l'avait regardé, il avait bien vu qu'elle n'allait pas pour le mieux et il avait donc décidé que, bien qu'il n'ait pas approuvé sa dernière escapade, la blâmer ne servirait à rien. Il n'allait pas non plus lui dire que c'était bien car cela serait lui mentir, mais il ne voulait pas gâcher le peu de moments qu'ils passaient ensemble en lui donnant encore plus de raisons de s'en faire, il ne voulait pas la faire culpabiliser encore plus, bien que ce ne serait pas à tort, mais il n'était pas là pour ça. Si elle amenait le sujet dans la conversation, il était prêt à en discuter, mais il ne ferait sûrement pas le premier pas, ne voulant pas que ses paroles soient mal interprétées ou qu'il dise quelque chose de travers.

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Un besoin de réconfort

Aurelia bénissait le guérisseur qui avait créé les potions qui lui donnait l’impression d’avoir une vraie vie mais ça n’avait pas toujours été le cas autrefois. Il y en avait eu pleins des guérisseurs qui étaient passé à la maison. Mais aucun n’avait vraiment trouvé de véritable moyen avant Perceval Knight-Lowell. En vérité, lorsqu’il était venu ces parents avaient déjà épuisé la plupart des guérisseurs connus du monde magique des Etats-Unis. Ils avaient commencé avec ceux de boston, et puis, ils n’avaient pas hésité par la suite à aller au fin fond des territoires des mages fondateurs pour trouver une personne qui serait véritablement utile. Perceval, lui, n’avait jamais été invité à rejoindre la horde de guérisseurs qui défilait dans la demeure des Jenkins. Aurelia ne se souvenait pas de tous car bien souvent elle changeait avec Cecily qui n’était pas des plus sympathiques. De plus elle n’hésitait pas à menacer les différents guérisseurs qui tentaient de la faire disparaître. Cecily n’avait jamais voulu disparaître. C’est pourquoi il était mieux pour elle de tout faire pour les en empêcher. Elle avait tout essayé au grand désespoir d’Aurelia qui ne pouvait assister à ça que de loin. C’était une période bien sombre et bien que cela lui ai paru des siècles. Entre la première apparition de Cecily et l’arrivé de Perceval Knight-Lowell, il ne s’était pas passé plus d’un mois.

Perceval était un jeune loup avide de faire ses preuves. Il était très doué et avait des méthodes assez nouvelles tout en respectant la tradition millénaire des guérisseurs sorciers. Quand les Jenkins l’avait vu arriver, ils n’avaient pas parié une mornille sur lui. Ces parents étaient désespérés. Si un guérisseur ne réussissait pas à trouver une solution, il y avait toujours Cecily pour les effrayer. De plus, Perceval n’était pas un Sang-Pur. Il était sang-mêlé et bien qu’il n’en fût pas responsable, c’était une tare immense aux yeux des parents d’Aurelia. Cependant, au fond du désespoir et fatigué, ils avaient accepté que le jeune homme tente sa chance. Le guérisseur n’avait d’ailleurs pas de chance car la première fois qu’il rencontra Aurélia, il fit en fait face à Cecily. Elle l’avait vu venir en ricanant et elle été prête à lui faire peur. Le précédent guérisseur l’avait faire tellement rire. Cet idiot pensait qu’Aurelia était posséder. Malheureusement pour Cecily, Perceval ne fut pas du tout impressionné par ses efforts pour le faire abandonner. Le jeune homme ne craignait pas son double maléfique. Il lui fallut peu de temps pour diagnostiquer son problème. Il lui en fallu un peu plus, par contre, pour trouver la formule de la potion.

Bien sûr, son succès par rapport à ses prédécesseurs, lui valut la reconnaissance des parents d’Aurelia. La jeune fille, elle-même, lui en était follement reconnaissante. Elle avait l’impression qu’il allait pouvoir l’aider. Perceval était assez malin pour tenter un tas de choses. Si au début, il lui avait semblé très sympathique, Aurelia ne tarda pas à se sentir mal en sa présence. Cecily et elle se sentait davantage comme des cobayes pour l’esprit fiévreux du guérisseur. Ce fut d’ailleurs la première fois que les deux personnalités aussi différentes des jeunes filles s’entendirent. Il y avait quelque chose de bizarre chez Perceval. Mais personne ne semblait s’en rendre compte car il ne lésinait pas à la tâche pour trouver une solution. Cependant, ce qu’il ne disait pas c’est qu’il utilisait bien le corps d’Aurelia pour tester tout un tas de choses. Il finit par découvrir que les feuilles du Vernis de Chine étaient la solution finale pour repousser les personnalités multiples d’Aurelia. Car oui, entre temps, Aurelia avait découvert qu’elle n’était pas seule avec Cecily dans son esprit. Si elle avait trouvé ça horrible, Perceval avait lui très apprécié la chose.

La jeune sorcière encore enfant, avait pensé que ça en serait fini mais en vérité Perceval était devenu complètement obsédé par le cas d’Aurelia. Il finit par oublier qu’il avait en face de lui un être humain et pas une expérience. Il l’effrayait véritablement. Heureusement pour Aurelia, ses parents et leurs préjugés à l’égard des sorciers qui n’étaient pas sang pur, lui furent véritablement utile. Une fois la potion acquise avec sa prescription, ils avaient fait en sorte que Perceval ne revint jamais. Aurelia en avait été terriblement soulagé. Cecily aussi d’ailleurs. Perceval avait été la première personne à effrayer toutes ses personnalités. Après ça, Aurelia, ne le revit jamais et elle finit par l’oublier. Cependant parfois lorsqu’elle devait prendre sa potion en catastrophe, elle repensait à ces événements et elle en avait encore la chair de poule.

Ce n’était véritablement par une bonne journée. Elle soupirait en mangeant la crème glacé au parfum vanille. Alors qu’elle se laissait aller à ses pensées moroses, elle vit une des personnes qu’elle aimait le plus dans ce monde : son frère ! Il se tenait dans la cuisine, un sourire, et une cuillère à la main. Il vint s’assoir près d’elle et prit un morceau de la glace. Elle était si contente de le voir. Il y avait peu de personne qui pouvait lui permettre d’oublier ses pensées moroses. Elle se comptait sur les doigts d’une main : son frère, sa sœur, sa sœur de cœur Ilaria, Zachary et Juliet. Il n’y en avait pas d’autres. Elle s’amusa de la remarque de son frère et prit une autre bouché de la glace avant de lui répondre :

« Je comptais le manger toute seule parce qu’il n’y a que ça pour m’apaiser. Mais maintenant que tu es là, tu peux m’aider à terminer le pot. Peut-être que mère finira par en acheter un nouveau du coup !»

Zut ! Elle aurait peut-être dû passer sous silence la partir sur l’apaisement. La jeune sorcière savait que c’était stupide. Elle avait réussi à repousser Cecily. Elle ne devrait pas en faire un plat. Mais c’était plus fort qu’elle, sa dépression devenait de plus en plus importante. Il y avait tant de chemins devant elle et aucun qu’elle ne pouvait véritablement emprunter sans trahir quelqu’un d’important pour elle. La jeune femme savait que les personnes les plus importantes de sa vie étaient tous biens différents et avaient des aspirations la concernant bien différentes. D’un côté il y avait Zachary et les merveilles d’un autre monde. De l’autre côté il y avait Faith, Ulrich et Ilaria avec les principes des Mages Fondateurs et leurs idéaux et enfin il y avait Juliet qui l’incitait à lâcher prise et vivre vraiment avec ses personnalités multiples. Bref, elle se trouvait à la croisée des chemins et les choix étaient bien difficiles à faire. Cependant, là en cet instant ce n’était pas ce à quoi elle voulait penser. La jeune femme voulait juste profiter de l’instant présent avec son frère. Elle adorait ses visites.

« Tu es en retard ! Je pensais que tu devais venir plus tôt. Mais je suis contente de te voir enfin » dit Aurelia avec un sourire en reprenant à nouveau de la glace.

Il n’y avait rien de meilleur que la glace pour oublier les soucis. Le sucre et la vanille glacée c’était excellent. De plus, elle était en agréable compagnie. Avec Ulric, la jeune femme était toujours calme et confiante. Elle venait de prendre sa potion et allait bien. Il n’y avait aucune raison qu’une de ses personnalités viennent gâcher l’instant. C’était ce qu’elle redoutait le plus souvent. Rien que d’y penser ça la rendrait triste et elle reprit à nouveau une cuillère de sa glace. Mais, elle ne voulait pas inquiéter son frère. Les membres de sa famille avaient le chic pour deviner ses humeurs. Non pas qu’elle soit transparente mais sa vie était faite d’habitude pour vivre avec son problèmes de personnalité multiple. C’est pourquoi le moindre changement leur permettait de comprendre que quelque chose n’allait pas forcément bien. Bien sûr, le plus souvent c’était sa mère et Faith qui s’en rendaient compte les premières parce qu’elles étaient plus souvent à la maison que son père. Quant à son grand frère, il vivait dans sa propre maison, loin de la demeure familiale et plus proche de son lieu de travail. Aurelia y était allé quelques fois mais chaque fois avec sa mère. Elle avait peu de marge de manœuvre lorsqu’il s’agissait de sortie et encore moins depuis ses récentes escapades qui faisaient rugir de colère son père. Elle espérait qu’Ulrich n’y ferrait pas allusion. Si elle pouvait passer outre les colères de ses parents, c’était plus dur avec son frère et sa sœur. Aurelia n’aimait pas les décevoir.

« Alors, comment c’était le travail ? » Demanda-t-elle.

C’était la pire question du monde pour tenter de détourner la conversation d’elle. Elle se demandait si Ulrich allait tomber dans le panneau. Aurelia aimerait bien. Elle ne voulait pas encore expliquer ses escapades. Elle voulait surtout qu’on la serre dans ses bras et lui dire que les choses allaient s’améliorer. Si les changements inquiétaient sa famille, ils ne s’étaient pas encore rendu compte à quel point elle était dépressive.