Dire que les temps étaient durs était un euphémisme et, lorsque Virginia Rookwood revit la silhouette de New Phoenix, elle en prit davantage conscience. Le mutisme dans lequel elle s'était plongée au lendemain de son accident avait incité ses parents à la sortir de cet environnement qui lui rappelait sans cesse ce bébé qu'elle avait perdu. Lorsque le scandale avait éclaté, Invictus Rookwood avait trouvé plus rassurant d'éloigner sa fille de la capitale du nouveau monde. C'est ainsi que la jeune Virginia était partie le jour même du kidnapping de son parrain, n'apprenant la nouvelle que bien plus tard. Aussitôt, elle s'était inquiétée pour son fiancé qui, même si elle le savait en relative sécurité, restait tout seul à New Phoenix. Immédiatement après, elle avait été submergée par une vague de culpabilité: elle n'avait plus le droit de s'inquiéter pour lui. Son accident remettait tant de chose en cause que la rousse s'étonnait de ne pas avoir de nouvelle concernant son mariage. Amochée comme elle l'était, elle se doutait que Saevus ne pouvait pas se permettre de marier son héritier à une femme dont la fertilité laissait à désirer. Les médicomages étaient encore incapables de lui dire si elle pourrait avoir des enfants à nouveau: elle qui s'était inquiété d'en avoir un trop tôt se retrouvait aujourd'hui sans certitude de pouvoir en avoir tout simplement. Cette constatation la rendait folle: elle n'en dormait plus la nuit, mangeait très peu et s'enfermait dans un silence que personne ne parvenait à briser. Les peu de mots qu'elle disait étaient des cris, la nuit, lorsque ses cauchemars lui faisait réclamer la présence d'Héres. Elle avait trouvé refuge chez une vieille amie de ses parents qui l'avait aidé à se remettre de la perte horrible de son bébé: même si elle n'était pas enceinte depuis longtemps, elle avait commencé à s'y faire et avait même commencé à imaginer une vie à trois. Mais les semaines passant Virginia avait commencé à tourner en rond: elle ne supportait pas de savoir Héres tout seul, quand bien même leurs fiançailles seraient rompus, il aurait besoin d'un ami et elle doutait qu'il écoute son frère ...

C'était sur un coup de tête qu'elle avait décidé de rentrer, ne prévenant ni sa mère, ni son père de son arrivée. Elle ne voulait pas avoir de comité d'accueil qui lui ferait les gros yeux: même si elle s'était remise, elle restait fragile et surtout, elle était une cible idéale en tant que fiancée d'Héres dont le visage avait été connu juste avant toute cette histoire ... Et puis ... Elle voulait voir Héres en premier. Bien que surprotégée pendant toute sa jeunesse, Virginia n'était pas stupide: dès qu'elle avait posé le pied à New Phoenix, elle s'était empressée de changer sa couleur de cheveux. Ses longues mèches rousses étant bien trop connue, elle avait opter pour une teinte plus passe-partout. C'était donc brune, ayant troqué ses vêtements luxueux pour un simple jean et un chemisier, qu'elle arriva près de la tour Yaxley. Se remémorant toutes les fois où elle s'était infiltrée en douce pour aller "s'amuser" avec son fiancé, Virginia réussit à trouver une brèche mais fut rapidement arrêté par une vague de sorciers voués à la protection de la tour. Expliquer qui elle était, et le prouver lui prirent quelques minutes et lorsqu'enfin elle fut libérée, elle se dirigea vers les bureaux d'un pas rapide. Alors qu'elle prenait conscience qu'elle n'avait jamais été aussi proche de le voir, Virginia ignorait si elle serait capable de survivre à ces quelques minutes. Elle avait l'impression que son coeur battait à un rythme totalement désordonné. Contrairement au rez-de-chaussé, l'étage des bureaux était totalement vide ce qui n'avait, quand elle y réfléchissait bien, rien d'étonnant: il était tard mais elle savait qu'elle trouverait Héres ici. Lorsqu'elle vit de la lumière dans son bureau, elle ne put retenir un sourire. Certaines choses ne changeaient pas, c'était rassurant. Elle traversa rapidement les pièces pour arriver à la porte du bureau tant recherché mais, la main sur la poignée, elle hésita. Et si les choses avaient changé depuis son départ ? Peut être avait-il changé d'avis ? Serait-elle capable de supporter cela ? Elle inspira profondément et ouvrit la porte.
Il n'avait pas changé du tout. Il était toujours aussi beau. Plongé dans un document, il n'avait pas relevé la tête s'attendant sans doute à ce qu'il s'agisse de quelqu'un d'autre. « Héres ? » sa voix résonna dans la pièce alors que, pour la première fois depuis des semaines, son regard croisait le sien.

C'était comme s'ils s'étaient quitté la veille, comme si tout ce qui c'était passé depuis quelques mois n'avait pas existé. Elle sentait son coeur battre plus vite à la simple vue de celui qui avait été son fiancé pendant tant d'années et elle eut l'impression de revivre dès lors que ses yeux se posèrent sur elle. « Virginia ? » Tout prise à sa joie de le revoir, elle en avait oublié le détail fâcheux de sa couleur de cheveux nouvelle. Elle qui avait toujours été rousse craignait d'avoir perdu son seul atout de beauté aux yeux de celui qu'elle aimait, craignant désormais qu'il ne la trouve banale. Cela ne sembla visiblement pas le déranger lorsqu'il se leva pour la rejoindre, l'enlaçant comme s'ils ne s'étaient pas vu depuis des années. Elle soupira de bonheur en sentant le corps du jeune homme contre le sien, comme s'il comblait, dans un même temps, le vide qui s'était créer dans son coeur. Elle avait redouté de le revoir ignorant quelle attitude adopter avec lui: après ils s'étaient très peu vu depuis qu'elle avait été admise à l'hôpital, en tout et pour tout une seule et unique fois avant que son père ne l'envoie hors de New-Phoenix. Son baiser sonna comme une délivrance aux yeux de la jeune femme qui ne regrettait pas une seule seconde d'être partie. Combien de crise d'angoisse avait-elle fait pendant son repos forcé ? Combien de fois avait-elle demandé à le voir malgré les refus de ceux qui veillait sur elle ? Elle le savait. Elle avait raison. Elle se sentait bien mieux là où elle était. Pour elle, il n'y avait pas d'endroit plus sur pour sa santé mentale que les bras d'Héres ... Lorsqu'il s'éloigna, elle sentit un froid s'installer. Quelque chose n'allait pas. Elle le connaissait et voyait bien qu'il n'était pas dans son assiette. Mettant cela sur le compte de l'absence de son parrain, Virginia refoula l'envie de le questionner immédiatement. Ce n'était pas le moment de le braquer. « Qu'est-ce que tu fais là ? Tout va bien ? » Elle hocha la tête distraitement: elle allait bien mieux que la plupart des gens de cette tour ... Elle ne gardait plus aucune trace de l'accident et elle avait retrouvé une vie normale grâce aux bons soins des médicomages. Physiquement oui. Tout allait bien. Pour le reste, il lui faudrait sans doute un peu de temps mais c'était en bonne voie, chose qu'elle ne dirait pas à Héres tant qu'elle n'était pas certaine qu'il aille bien. « Il me faut une raison pour venir voir mon fiancé maintenant ? » dit-elle en forçant un sourire. C'était l'excuse qu'elle lui avait toujours sortie, lorsqu'elle s'incrustait dans son bureau sans véritable raison.

Elle se laissa emmener jusqu'au fauteuil, épuisée par tout ce qu'elle avait du faire pour le retrouver. Pourtant, quand il retira sa main de la sienne, Virginia sentit un grand vide se faire entre eux. « Tu m'as manqué. » Elle sourit, il lui avait manqué aussi. Affreusement même. Elle n'avait pas eut de nouvelle de lui depuis son départ, n'apprenant ce qu'il se passait à New-Phoenix que par le biais des médias. Elle n'avait pas compris pourquoi personne ne voulait lui parler d'Héres, ni même pourquoi elle ne pouvait pas le contacter. Son père lui avait dit qu'il avait beaucoup de travail notamment pour redorer son image ... Néanmoins, voyant la mine sombre du jeune homme, la plus-si-rousse-que-cela explique la véritable raison de sa présence. « Héres ... Il faut qu'on parle. » Elle se pencha pour prendre sa main dans la sienne. « Je suis venue parce que je pensais ... Que tu aurais besoin d'un vrai soutient ici. Je m'inquiète pour toi et ... » Elle baissa les yeux vers leurs maintes jointes « J'avais besoin de te voir. » Il fallait qu'ils parlent de ce qui était arrivé, de ce qui allait se passer à présent. Elle voulait que les choses soient de nouveau clairs entre eux, comme auparavant. « Il n'y a pas un jour où je n'ai pas pensé à toi depuis mon départ. » chuchota-t-elle en se rapprochant un peu de lui.

Il y avait quelque chose d'étrange, dans les yeux d'Héres. Quelque chose que Virginia ne parvenait à saisir mais qui ne lui disait rien de bon. L'attitude distante de son fiancé l'inquiétait mais ne collait pas avec les mots qui lui disait depuis son arrivée: s'il prévoyait de la quitter, pourquoi lui dire qu'elle lui manquait ? Ce n'était pas logique. Chaque chose venant en son temps, Virginia prit sur elle, persuadée qu'il finirait par lui dire ce qui le tracassait lorsqu'il s'en sentirait capable: les temps devaient être suffisamment difficiles pour lui sans qu'elle n'en rajoute une couche.  « J'ai pensé à toi tous les jours moi aussi. » Elle le trouvait si mignon, lorsqu'il tentait d'exprimer un quelconque sentiment avec une certaine maladresse qu'elle trouvait vraiment touchante. Néanmoins, si elle se serait satisfait de cela, quelques mois auparavant, aujourd'hui, la différence chez Héres était frappante et surtout, inquiétante aux yeux de la jeune femme qui mourrait d'envie de le presser de question. Elle sentait une lutte intérieur chez son fiancé et se sentait profondément impuissante face à un mal qui semblait le ronger et dont il ne lui faisait aucunement part. Comment son père avait-il put lui dire qu'Héres allait bien quand, visiblement, ce n'était pas le cas ? Elle regretta d'avoir quitté New Phoenix, se demandant subitement si elle n'avait pas cherché à fuir une conversation dont elle ne voulait pas avec lui, plus que de chercher à se rétablir. « Virginia, est-ce que tu sais que j'ai tué une femme lors de l'enlèvement ? » Sa voix la frappa de plein fouet alors qu'elle tentait d'intégrer ce qu'il lui disait. « Que ... Quoi ? » lâcha-t-elle sous le coup de la surprise, paralysée par ce qu'il venait de lui dire. Comment son Héres avait-il put ... Et puis, elle fut percuter par une évidence. Il parlait de ce jour là. Elle retrouva ses esprits, serrant la main du jeune homme entre les siennes. « Est-ce ce qui te trouble tant ? » Virginia était confrontée à un dilemme: s'offusquer qu'il ait put prendre une vie, même en état de légitime défense, ou passer pour une grande psychopathe en le réconfortant. Malgré toute sa bonne volonté, elle ne parvenait pas à justifier un tel acte de la part des Inquisiteurs: pourquoi devaient-ils être punis pour quelque chose qu'ils n'avaient pas commis ?

Virginia inspira profondément et caressa la main d'Héres avec tendresse. « Tu n'as fais que défendre ta vie, Héres. C'était légitime. Cette femme ... » Elle soupira, ne sachant quels mots employer « Elle menaçait ta famille. Ton père a disparu, ton ami a disparu ... Mais si toi tu n'étais plus là ... Je ne crois pas que le Nouveau-Monde y survivrait. » Il était maintenant au centre de toute l'organisation du territoire fédéré par son père. Il fallait qu'il redresse un navire en train de couler après un scandale terrible qui avait éclaboussé autant le nom de Yaxley que celui de Rookwood. « Je ne crois pas ... Que j'y survivrais. » ajouta-t-elle d'une petite voix en baissant les yeux. « Je ne supporterait pas de te perdre aussi. » Reprit-elle après quelques secondes, relevant la tête vers lui. « Il y a longtemps tu m'as fais une promesse ... Ne pas mourir de cette manière » dit-elle tout d'un coup sérieuse. « Ne l'oublis pas car il n'y a que moi qui ait le droit de te tuer. » acheva-t-elle avec un sourire. Il était devenu le centre de son univers, il était tout ce qu'elle avait, la seule personne en qui elle était encore capable de croire. Elle en serait certainement pas la sans lui, sans tout ce qu'il avait fait pour elle le soir où elle avait fini à l'hôpital. Héres était plus que les portraits qu'on faisait de lui dans les magasines, plus que celui que tous se plaisaient à détester en ce moment. « Je me suis récemment demandé si tout ce qui nous arrivait n'était pas une sorte de punition divine ... » dit-elle, laissant ses pensées les plus intimes déferler. « Saevus enlevé, notre enfant qui ... N'était-ce pas des punitions suffisantes ? » Son coeur se serra à cette idée. Ce qu'avaient fait leur grands-pères étaient inexcusables mais, en serrant la main de son fiancé, Virginia savait qu'il ne ferait pas les mêmes erreurs. Il avait le talent, le charisme et les aptitudes pour être au poste qu'il occupait actuellement et la jeune femme en était persuadée, il était le seul a pouvoir l'occuper. « Ces gens sont en colère et leur colère est légitime, mais ne la laisse pas t'atteindre: tu auras bien plus de raison d'être blessé dans ta vie privé ... Si tu laisse la vie publique te bouffer ... » alors elle ne donnait pas cher de sa peau. S'approchant de lui, elle déposa un baiser sur sa joue. « Montre que tu es fort Héres. Je serai toujours là. »

Plus les minutes passaient, plus Virginia avait l'impression que son départ avait fait plus de mal que de bien. Elle s'en voulait de n'avoir put être avec lui lorsque le destin avait abattu sa sentence sur la famille Yaxley, elle s'en voulait d'avoir crut que disparaitre de la vue d'Héres permettrait au jeune homme de se reconstruire après qu'elle ait prouvé son incapacité à garder leur enfant. Cette histoire leur avait fait beaucoup de mal mais la jeune femme se rendait compte que ce qui avait suivit avait suffit à achever son fiancé. Lorsqu'il s'était agenouiller devant elle, cherchant du réconfort en la serrant contre lui, sa tête sur sa poitrine, Virginia s'était laissé aller à glisser ses doigts entre les mèches sombres d'Héres, se plaisant à oublier tout ce qui leur était arrivé pour ne se concentrer que sur lui. Lui qui semblait si fragile en cet instant. « Je n'en avais pas le droit Virgi. Je ne sais pas pourquoi j'ai fais ça. Et...j'ai également envoyé Zach à sa propre mort. Il ne doit déjà plus être vivant et c'est de ma faute. » La sorcière pinça les lèvres, incapable de dire quoi que ce soit à la mention de celui qui avait sans doute était l'ami le plus fidèle d'Héres. Bien qu'ils ne se connaissent pas depuis longtemps, Virginia avait été impressionnée par la façon dont le gardien des dragons avait traité son fiancé, appréciant que, pour une fois, quelqu'un oubli un peu son nom. C'était sans doute leur plus grande plaie. Ce nom qu'ils devaient porter, lourd de sens et d'espoir: celui d'Héres plus que le sien mais elle partageait ce sentiment de n'être compris de personne. Elle même n'avait eut que très peu de vrais amis, lorsqu'elle y réfléchissait bien. Si le nom de Rookwood agissait comme barrière entre elle et le reste du monde, elle se doutait bien que celui de Yaxley devait avoir l'effet d'un canyon. Voir comment Héres avait réussit à s'ouvrir aux autres et surtout à cet homme lui avait réchauffé le coeur. « Rien ne dit que ... » Elle n'était pas persuadée que Zach soit mort, elle n'arrive pas à se faire à cette idée. C'était un impensable. Pourtant, Héres semblait le croire dur comme fer. « Je le vengerai, sois en sur. » Le regard du jeune homme se fit plus dur et Virginia ne sut quoi faire. Bien sur, il restait l'homme qu'elle aimait mais elle avait l'impression, lorsqu'il arborait ce visage, qu'elle avait affaire à quelqu'un d'autre. Mais ces pensées disparurent dès que les lèvres du brun s'écrasèrent sur les siennes. Elle eut une pensée étrange, perdue par le comportement lunatique de celui qui avait toujours été d'un calme olympien.

Lorsqu'il retourna s'assoir sur sa chaise, Virginia comprit que la discussion deviendrait soudainement plus sérieuse, moins axée sur ce qui était arrivé lors de la conférence mais beaucoup plus sur eux. Il y avait beaucoup de décision à prendre, les concernant, avant de se lancer dans une quelconque riposte qu'elle soit médiatique ou plus concrète. Virginia le savait: si la côte de popularité d'Héres avait connu une chute libre, c'était le moment pour lui de redorer son image en se démarquant de son père ou en gardant la même stabilité, la même attitude rassurant et fédératrice. Sa propre présence dans l'entourage du jeune homme était certainement mal vu par les plus proches conseillers du jeune homme, même si elle n'était pas sur qu'on lui en ait officiellement parlé ... Après tout, les Rookwood et les Yaxley avaient toujours été très proches, suffisamment pour partager ce secret terrible et la garder près de lui était un risque que Virginia comprenait parfaitement. Pourtant, elle voulait croire en la complicité qui était née entre eux ... Si la sorcière aurait compris qu'il lui demande de prendre ses distances, elle espérait qu'il la garderait avec lui comme la partenaire qu'elle avait toujours été, même si, à l'époque, il s'agissait d'une tout autre forme d'alliance entre eux. « Une punition divine ? Non. Juste de la malchance. » Une malchance qui semblait se complaire à les attaquer de plein fouet, se retint-elle de faire remarquer. Elle savait qu'il cherchait à la protéger. C'est ce qu'il faisait depuis qu'ils étaient tout petit, et ce, même quand elle le rejetait en bloc. « Virginia est-ce que tu veux toujours être ma femme ? Est-ce que tu veux toujours m'épouser ? » Perdue dans ses pensées, la jeune femme n'avait pas sentie Héres lui prendre la main et ses yeux s'écarquillèrent de surprise en comprenant ce qu'il lui demandait. Alors il ne voulait pas se débarrasser d'elle ? Elle, l'épouse dont il n'était pas certain qu'elle puisse, un jour, lui donner le fils qu'on attendait d'elle ? Héres, épouse moi pour moi elle se souvenait parfaitement de ce jour, dans la bibliothèque du manoir Rookwood. Ce jour où elle lui avait demandé d'oublier l'accord de leurs parents et de prendre sa propre décision. Elle n'était pas dupe, à cette époque, elle savait qu'il ne l'aimait pas. Pas comme elle l'aurait voulu. Aujourd'hui, elle ne savait plus. Elle baissa la tête, tentant de dissimuler ses yeux devenant rouge par l'arrivée soudaine de larmes. « Il n'en a jamais été autrement, Héres. » murmura-t-elle d'une voix étranglée. Elle avait l'impression d'avoir subit le pire et, à présent, d'entrapercevoir un rayon de soleil. Après tout, il avait eut tout le temps pour penser à sa condition, elle n'imaginait pas son parrain, calculateur comme il l'était, ne pas prendre position par rapport à cela. « Mais toi ... Tu es sur que ... » Elle posa une main tremblante sur son ventre, à l'endroit même où une fine cicatrice se dessinait encore un peu. « Je ... Je ne sais toujours pas si je pourrais un jour ... » avoua-t-elle à voix basse, honteuse de n'être décidément capable de rien. Lorsque ses yeux retrouvèrent ceux du brun, ce qu'elle y lut lui redonna force et confiance. Elle eut alors un sourire et se leva brusquement, tendant sa main vers lui « Très bien. Si tu veux toujours m'épouser alors ... » C'était une idée folle. Complètement dingue. Absolument pas raisonnable et probablement dangereuse dans sa réalisation. « Faisons-le. » Il n'y avait rien qu'elle ne ferait pas pour lui et l'idée d'un grand mariage, comme celui que sa mère voulait pour elle, ne l'enchantait pas plus que cela. Tant qu'il y avait Héres, elle se fichait bien du reste. Virginia avait prit sa décision dès le moment où elle avait compris qu'il ne comptait pas la laisser sur le bord de la route: peu importe ce qu'il avait fait lors de cette conférence, elle aurait certainement fait pareil, peu importe les décisions difficiles qu'il aurait à prendre, elle serait là avec lui. Elle avait décidé qu'envers et contre tout, ce serait eux contre le monde entier. Quand bien même il lui faudrait affronter Saevus en personne: elle montrerait qu'elle était la seule capable de se tenir aux côtés d'Héres.

Virginia ne pensait pas que son fiancé se laisse ainsi convaincre: Héres avait toujours été la tête calme et pensante de leur duo quand elle même s'enflammait pour un rien. Pourtant, lorsqu'il se leva à son tour, attrapant sa main, la trainant derrière lui, elle ne put s'empêcher d'éclater de rire. Qu'Héres se lâche était un miracle et qu'il décide de prendre une décision aussi importante que celle ci, sans l'aval de son père relevait carrément du mythe. Mais Virginia appréciait sa façon d'être, à la fois stable et sérieuse - qui compensait sa propre impulsivité - mais qui laissait parfois place à des coups de folie comme c'était le cas ce soir. Elle eut une pensée pour sa mère, qui ne manquerait pas d'avoir un infarctus en apprenant ce qu'ils s'apprêtaient à faire: elle qui préparait se mariage depuis que sa fille était en âge d'utiliser la magie ferait surement une syncope en apprenant que son unique enfant allait se marier en jeans sur un toit d'immeuble ... Mais elle ne voulait pas de sa mère ici. Ni de son père d'ailleurs. Ni même de personne. C'était un mariage d'amour qu'elle voulait et avoir sa famille ici reviendrait à admettre qu'elle épousait Héres par obligation. Il y avait quelque chose de très romantique dans le fait de se marier ainsi: juste lui, elle et personne d'autre suite à une décision absolument pas réfléchie mais venant de leurs coeurs.  « Mon père veut un enfant de  notre lignée et il en aura un. Je lui ai fais cette promesse. Mais c'est parce que je t'aime que je sais qu'on parviendra à en avoir un autre. » Alors qu'Héres faisait apparaitre leurs alliances, elle se repassait des mots en boucle depuis quelques minutes ... Perdue entre la joie qu'il lui dise son premier je t'aime et l'angoisse de ce que pouvait impliquer cette promesse faite à Saevus. Mais elle s'en occuperait plus tard: elle savait qu'elle trouverait un moyen de ne garder Héres qu'à elle. Quand bien même elle devrait forcer son propre corps à lui obéir. Intérieurement, Virginia jubilait. Pas uniquement parce que, pour une fois, il se laissait aller à la folie - quoi que leurs nombreuses parties de jambes en l'air dans des endroits improbables puissent être comptées dans le lot - mais parce qu'elle savait que ça venait du vrai Héres. Ils finirent par prendre la direction de l'extérieur, arrêtés par l'homme charger de la sécurité, celui même qui lui avait fait perdre vingt minutes avant de comprendre qu'elle était bien ... Elle. Inconsciemment, elle se rapprocha de son fiancé, attrapant son bras avec appréhension avant d'être surprise par la capacité de ce dernier à renverser la situation. Cinq personnes: eux deux, deux personnes de confiance pour leur servir de témoins et une dernière pour officier. Leur mariage devenait concret et Virginia se surprit à ne pas avoir le moindre doute. Elle avait toujours été angoissée par l'idée d'épouser un homme qu'elle n'aimerait pas mais, en regardant Héres qui s'affairait pour elle, elle n'avait pas la moindre interrogation. Elle aimait cet homme comme jamais. « Merci. Rejoignez nous sur le toit. » La jeune femme eut un sourire pour celui qu'elle maudissait moins d'une heure auparavant et suivit son fiancé jusqu'au toit tout en riant doucement. Elle ne l'avait jamais vu dans un tel état et savoir qu'elle en était en partie responsable l'amusait beaucoup.

Bien sur, elle était déçue que certaines personnes ne soient pas présentes. Bien qu'elle ne désire pas particulièrement la présence de ses parents, elle avait toujours été persuadée de partager ce moment avec eux. Et il y avait Olivia, repartie depuis quelques semaines, sans doute au fin fond de l'Amazonie, injoignable. Priscus, dont elle savait que la présence manquerait à Héres, ce dernier lui ayant fait part, quelques mois auparavant de son envie que son frère soit témoin ... Lyra, qui avait été d'un immense secours quand sa propre mère ne pouvait venir l'aider pour les préparatifs. Et puis, il y avait Zach. Celui qui avait toujours été la depuis qu'ils l'avaient rencontré, qui était l'un des rares à être venu la voir à l'hôpital après son accident. Son coeur se serra en repensant à ce qu'avait dit Héres un peu plus tôt. Etait-il vraiment mort ? Elle ne pouvait se résoudre à le penser ... Elle ferma les yeux alors que l'air les décoiffaient tous les deux et lâcha la main d'Héres pour faire un tour sur elle même, bras écartés, appréciant le semblant de liberté qu'ils avaient sur ce toit. Lorsqu'elle rouvrit les yeux, rencontrant la silhouette de son fiancé, elle fut traversée par une vague de tristesse en le voyant regarder le sol avec son air inquiet. Elle se rapprocha, se penchant légèrement pour voir ce qui semblait perturber à ce point. Des vestiges, des restes de la manifestation, laissés là pour le lendemain, sans doute. Elle soupira et força Héres à la regarder, ses paumes encadrant son visage tourmenté. « Chut. N'y pense pas. Pas ce soir. » Lui dit-elle sérieusement. Ce soir, c'était leur soirée: ils n'étaient ni l'héritier Yaxley, ni l'unique fille de la noble famille Rookwood. C'était juste Héres et Virginia, rien de plus. « Et si tu n'y arrives pas ... Alors ne regarde que moi. » Un constat lui vint soudainement et elle s'éloigna un peu, sortant sa baguette pour, d'un mouvement de poignet, retrouver l'éclat roux de ses cheveux. Juste lui et elle. Pas d'artifice. Pas de mensonge. « A notre avenir. » lui dit-il après l'avoir embrassé une nouvelle fois. Elle sourit de nouveau: euphorique de savoir que, très vite, leur mariage serait bien plus qu'un projet qu'on leur rabâchait depuis l'enfance. « Toi et moi ... Pour toujours et à jamais. » chuchota-t-elle avant de fermer les yeux, reposant sa tête contre l'épaule du jeune homme, se laissant bercer par l'air frais de la nuit et la respiration de celui qui était le centre de son univers. Après quelques minutes, la porte du toit s'ouvrit de nouveau, laissant apparaitre les 3 personnes qui avaient acceptés de les suivre dans cette folle entreprise: les 3 personnes en qui Héres avait suffisamment confiance pour leur confier leur mariage. Même si cela n'avait rien du mariage prévu par leurs familles, le protocole était le protocole et Virginia réprima un gloussement nerveux alors qu'enfin, ils allaient échanger leur voeux. « Héres Saevus Yaxley, acceptez vous de prendre pour épouse Mlle Virginia Lucia Rookwood ici présente ? » Sa respiration se bloqua quelques instants alors que la rousse craignait un changement de dernière minutes de la part de son amoureux. Il n'était pas encore trop tard pour faire demi-tour après tout ... « Oui. » Elle mordit sa lèvre inférieure, un peu nerveuse, alors que l'homme se tournait à présent vers elle. « Mlle Virginia Lucia Rookwood, acceptez vous de prendre Monsieur Héres Saevus Yaxley, ici présent ? » Elle prit une grande inspiration et avec un sourire tendre pour celui qui allait devenir son mari, souffla son accord d'une voix un peu enrouée par l'émotion. « Oui. » Rougissante et obnubilée par le regard d'Héres sur elle, la jeune femme ne prêta pas vraiment attention à l'homme qui venait de reprendre la parole. La fin d'une phrase parvint néanmoins à ses oreilles. « ... vous déclare à présent mari et femme. Vous pouvez embrasser la mariée »  et Virginia Rookwood ferma les yeux pour la dernière fois, elle se laissa emportée par ce qu'elle ressentait, embrassant Héres avec tout l'amour qu'elle avait pour lui. A présent, elle était Virginia Yaxley et, quelque part, cela était étrange. Elle tenta de ne pas penser à la tête que ferait son parrain en apprenant la nouvelle, ni même celle que ferait ses parents lorsqu'ils découvriraient ce qu'ils avaient fait. Prenant la main de celui qui était à présent son mari, Virginia signa les documents qui faisait officiellement d'elle l'épouse d'Héres et remercia Marvin, son épouse et l'homme qui les avait marié. Profitant que les trois invités soient plongés dans une discussion, elle se tourna vers le brun, laissant sa main glisser sur la taille du jeune homme. « Je suppose que ce n'est pas la peine que je rentre chez moi ce soir ? » lui chuchota-t-elle de manière à ce que lui seul puisse entendre. Un petit sourire taquin naquit sur ses lèvres alors qu'elle le provoquait un peu. Reprenant son sérieux, elle continua à voix basse « Bon et bien ... Maintenant on a de quoi se faire tuer tous les deux ... » Malgré ses mots, elle ne regrettait absolument pas son geste: savoir qu'elle allait pouvoir rester avec lui l'emplissait d'un étrange bien être et Virginia savait qu'elle ne rentrerait plus chez ses parents. Ni ce soir, ni aucun autre soir. Même si elle restait encore quelques jours Virginia Rookwood, elle se doutait qu'Héres ne la laisserait pas partir et elle préférait ne pas être la quand ses parents apprendraient la nouvelle.

Elle ne put cacher sa surprise lorsqu'il lui répondit tout simplement un « C'est ce qu'ils voulaient au fond ? Nous voir marier. Et bien, à présent, c'est fait. » Hésitant entre stupeur et amusement, la jeune femme réprima un rire alors qu'elle avait l'impression, pour la première fois, de ne pas avoir l'impression d'avoir affaire à un Yaxley mais juste à un jeune homme de vingt-quatre ans. Elle aurait aimé que cette soirée ne s'arrête jamais car elle ne craignait qu'une chose: que trop de bonheur attire de nouveau sur eux un malheur encore plus grand. « Dans le fond peut être ... Mais pour la forme on repassera ! » Oh oui, les jours à venir seraient terrible mais Virginia s'en fichait: elle avait eut le mariage qu'elle voulait et personne ne pourrait dire qu'il s'agissait d'une union de raison. « Même si je trouve cela incroyablement romantique, je doute sérieusement qu'un mariage secret sur le toit de la tour était ce que ton père voulait pour toi. » De toute façon, Saevus Yaxley et Héra Rookwood ne pourraient rien dire: ils étaient mariés officiellement et il leur faudrait des mois pour faire annuler cela. Des mois qu'elle s'emploierait à leur rendre une vie impossible s'ils tentaient quoi que ce soit pour la séparer d'Héres. La conversation fut interrompue par le retour de l'unique femme du groupe et la soirée se prolongea encore un peu, Virginia profitant un maximum du calme avant la tempête. Ces gens qu'elle ne connaissait pas avant ce soir, était d'une gentillesse incroyable et cela lui donnait l'impression d'être une jeune femme comme une autre. Elle ne se rendit pas immédiatement compte qu'elle avait froid. Pas avant qu'Héres ne dépose son pull sur ses épaules. Elle leva alors les yeux vers lui, le remerciant silencieusement avant d'enfiler le vêtement. Trop grand pour elle, la rousse se plut à nager dans le pull de son mari, s'emmitouflant dedans avec un sourire béat aux lèvres avant de se lover dans les bras du jeune homme. Le froid de la bague contrastant avec la chaleur de sa main la gardait dans une euphorie étrange: il était à elle. Rien qu'à elle. Ce sentiment faisait chavirer son coeur et la comblait de joie.

Une fois tout le monde partit, ils se dirigèrent vers l'ascenseur, regagnant les appartements d'Héres: comme elle l'avait pensé plus tôt, il n'avait aucune intention de la laisser rentrer sagement chez ses parents au vu des baisers qu'il lui donnait. Bien qu'il reste sage, Virginia sentait que leur soirée était loin d'être terminée et l'idée de pouvoir retrouver celui qu'elle aimait, comme il se doit, lui traversait l'esprit depuis des jours. Ce n'était pas pour rien qu'elle le demandait lorsqu'elle émergeait de ses cauchemars: il n'y avait que lui qui avait ce pouvoir là sur elle. Et savoir qu'aujourd'hui, elle était enfin sa femme ne faisait qu'attiser son désir pour lui. Même s'ils n'avaient pas attendus d'être mariés pour découvrir ensemble les joies de l'amour physique, ils n'avaient encore jamais passé une nuit ensemble. En effet, la plupart du temps, ils se retrouvaient en cachette ou tentaient d'être discret. Sa bibliothèque avait été témoin de l'unique fois où ils s'étaient fait prendre en pleine milieu d'une merveilleuse partie de jambes en l'air mais il n'était pas rare qu'ils s'éclipsent des soirées mondaines auxquelles ils étaient invités, ou même qu'ils profitent d'un creux dans l'emploi du temps très chargé du jeune homme ... Depuis ses dix-sept ans, et jusqu'à aujourd'hui, il avait été le seul et l'unique. La rousse avait, bien sur, été tentée de se laisser aller à un léger flirt avec d'autres hommes, lors des soirées où Héres n'était pas là - tout comme elle se doutait que le regard du jeune homme avait du se poser sur d'autre femme qu'elle - mais elle n'avait jamais céder. Même lorsqu'elle refusait leur union: elle lui était restée fidèle depuis le début. Et aujourd'hui, la seule pensée qu'il lui venait pour expliquer cela était pourquoi aller voir ailleurs quand on a tout ce qui faut sous la main. Héres n'était pas seulement beau, intelligent et très bon parti ... Il était ce genre de personne qui parvenait toujours à vous surprendre et la rousse ne se lassait jamais de leurs étreintes.
Le bruit de l'ascenseur la ramena à la réalité presque autant que la chaleur qui se répandait sur ses joues à présent cramoisies, rougies par les pensées qu'elle venait d'avoir envers lui. « Demain, nous annoncerons la nouvelle à ma mère, tes parents et mon frère. Mais avant ça, on a la nuit pour nous. » lui dit-il comme pour la rassurer de son angoisse passée. Le visage de la jeune femme laissa apparaitre une vague grimace alors qu'elle ne pouvait s'empêcher de répondre « Je préférerais nettement attendre que les journaux révèlent tout. » Son regard clair croisa celui d'Héres nettement plus surpris « Ne me regardes pas comme ça, tu le sais très bien. Même si j'ai confiance en ces gens ... Quelqu'un finira par remarquer notre absence sur les caméras, ou ton alliance ou ... Je sais pas mais ça finira par se savoir. Si ce n'est pas demain, ce sera le jour d'après, mais je donne moins de trois jours aux journaux pour répandre la nouvelle dans tout le pays. » Et dans un sens, ça l'arrangeait: la part égoïste d'elle même mourait d'envie que tout le monde sache que son absence n'était pas dû à une quelconque rupture, qu'il était à elle et rien qu'à elle tout comme elle même n'appartenait qu'à lui. Et d'un autre côté, elle voulait préserver cette bulle qui existait autour d'eux depuis quelques heures leur permettant pour une fois d'agir sans avoir à se préoccuper du reste du monde.

Elle ressentie une pointe d'appréhension en entrant dans les appartements d'Héres. Elle n'y était venue qu'en de très rares occasions puisqu'elle était presque toujours chaperonnée par un proche de ses parents lorsqu'elle se rendait à la Tour Yaxley. Sachant qu'il n'y avait aucune caméra de surveillance dans cette partie du bâtiment - intimité oblige - Virginia patienta quelques instants, attendant que le jeune homme ferme la porte. Elle se jeta alors sur lui, laissant tout son amour et son désir s'exprimer après avoir été bridés aussi longtemps. Il lui avait manqué. Sur tous les plans. Elle s'éloigna un peu pour faire passer le pull qui lui avait prêté par dessus sa tête et l'attira à elle de nouveau, laissant ses mains caresser ce corps qu'elle connaissait presque par coeur mais dont elle ne parvenait à se lasser, laissant doigts glisser le long de sa chemise, se prendre dans les boutons avant de les défaire.

Elle se doutait bien qu'ils ne pouvaient pas laisser les choses aller comme si de rien n'était. S'il n'y avait eut qu'elle, ils se seraient enfermés tous les deux dans cette tour - et elle savait qu'ils trouveraient de quoi s'occuper - et auraient attendu que l'orage passe. Mais il n'y avait pas qu'elle et il fallait avouer qu'il ne s'agissait pas vraiment d'un décision d'adulte. La réponse du jeune homme ne se fit pas attendre « Virginia...Nous devons l'annoncer nous-même. Nous ne pouvons pas nous permettre de ressembler à deux écoliers pris en faute de cachoteries... » Elle détourna les yeux dans une moue boudeuse. Elle le savait bien ! Mais elle n'était pas suicidaire et il n'avait toujours vu que le visage "protocolaire" que sa mère montrait à tous ceux qui venait de l'extérieur. Elle avait hâte de le voir changer d'avis ! Il ferait moins le fier face à une Héra déchaînée. Tandis que la rousse tentait de trouver un plan qui lui éviterait de finir au couvent pour le reste de ses jours, il continua. « Et avant ce simple communiqué, rien de très fanfarons, nous devons l'annoncer à nos familles. Si tu veux, je peux m'occuper de ta mère... » Le sourire qu'il lui adressa eut le don de la faire fondre et l'empêcha de lui répondre qu'il serait plus aisé de convaincre les Inquisiteurs de rendre les armes que parler avec Héra Rookwood.  « J'admire ton courage, mais je ne tiens pas à devenir veuve ... Je viendrais avec toi, ça vaudra mieux ... » céda-t-elle en soufflant. De toute façon, il obtenait toujours ce qu'il voulait et il n'avait pas tort, ils avaient peut être une chance de survivre s'ils y allaient d'eux même. Sa mère sortie totalement de ses pensées dès l'instant où il l'attrapa pour l'amener dans sa chambre. Et pendant la bonne demi-heure qui suivit, seul Héres s'imposait à son esprit.

Lorsqu'elle revint à la réalité, le coeur battant encore à la chamade, son regard se posa sur l'anneau à son doigt. Avec un sourire, elle tourna la tête vers le brun et se retourna complètement pour venir se caler contre son épaule. Déposant de légers baisers sur son épaule, la jeune femme laissa sa main parcourir le torse de son mari en de tendres caresses. Lorsque ses yeux rencontrèrent le visage si familier de son aîné, elle fut surprise de le voir si calme, il semblait avoir rajeuni de dix ans, à des kilomètres de ses préoccupations habituelles. Avec un sourire, Virginia ne put s'empêcher de lui demander « Alors Monsieur Yaxley ... Quels sont vos projets à présent ? » Elle espérait qu'il abandonne un peu son bureau et toutes les mauvaises nouvelles qui lui attendaient ne serait-ce que pour le reste de la nuit, voir même le lendemain. Mais la rousse ne se faisait pas d'illusion: si la soirée - début de matinée - étaient encore à eux, elle devrait rendre son mari à ses obligations une fois le soleil levé. Elle se demandait ce qu'elle ferait, elle même, maintenant. Lorsqu'elle vivait au manoir Rookwood, elle n'avait rien d'autre à faire que lire, jouer du piano et s'introduire en douce ici pour venir déranger Héres dans son travail. Mais à présent, elle ne voulait plus être l'adolescente oisive et attardée qu'elle avait été. Elle voulait être utile à son époux mais ignorait encore comment. Enfin si ... Elle avait bien une idée mais cela nécessiterait qu'elle le kidnappe dans cette chambre à longueur de temps et elle doutait que le côté sérieux du jeune homme accepte cette proposition. « Quand j'ai dis que je serai avec toi ... Je le pensais vraiment. Je ... J'ai envie de t'aider. » finit-elle par avouer alors que ses doigts s'entremêlaient à ceux d'Héres.

Virginia ne put s'empêcher de trouver, à tout leur histoire, un côté assez épique et romantique. Après tout, ils étaient promis l'un à l'autre depuis leur plus tendre enfance et elle l'avait détesté avant d'en tomber follement amoureuse. Elle avait lutté contre son attachement pour lui, été démonstrative pour deux quand on attendait de lui qu'il suive les traces de son père. Elle avait porté, puis perdu leur enfant dans une épreuve terrible qui les avait, finalement, rapproché. Et, aujourd'hui, après tout ce qui leur était arrivé, elle était enfin sa femme. Rien que ça, suffisait à son bonheur. « Et bien Madame Yaxley,je comptais m'endormir en vous regardant dormir » Elle eut un sourire attendri alors qu'il se tournait pour lui faire face. Madame Yaxley. Cela sonnait toujours étrange à ses oreilles: pour elle, cette appellation la renvoyait à sa première rencontre avec la mère de son époux, lorsqu'elle était encore enfant. « Ensuite, j'aimerai qu'on s'installe chez nous. Qu'on ait enfin un chez-soi. Je pense qu'on pourra avoir ça dès demain soir. » Il lui en avait souvent parlé, pendant les préparatifs de leur mariage officiel: des appartements avaient été préparés pour eux depuis quelques temps déjà et la jeune femme ne put s'apprécier de ne plus avoir à supporter ses parents: elle les aimait, mais elle doutait sérieusement qu'ils accueillent avec joie la nouvelle de son mariage. Et puis, elle préférait nettement rester auprès d'Héres: c'était sa vision de leur union, dorénavant, elle serait auprès de lui quoi qu'il lui en coute et faire comprendre cela à sa famille, passait par cette séparation, aussi brutale qu'elle puisse être pour les Rookwood. De plus, la présence d'Héres à chaque minutes près d'elle, lui garantirait de ne pas finir dans une colonie de cracmol ou autre endroit terrifiant dont on parlait aux enfants pas sages ... « Entre temps, je crains qu'il va falloir être courageux et l'annoncer à nos familles. Ensuite, à la presse. » Elle grimaça, cette partie du plan ne l'enchantait guère mais elle ne pourrait y couper. Elle avait vingt-six ans, il était tant d'agir comme tel !  Héres semblait, lui, perdu dans ses pensées, peut être déjà en train d'imaginer tous les scénarios possibles quand à l'annonce de leur union clandestine. Si Virginia avait vu cela comme le fruit de leur amour, l'ultime preuve qu'ils s'aimaient envers et contre tout, et non pour un quelconque arrangement parental, d'autre pourraient prendre la chose autrement. Sans parler de leurs familles, certains pourraient les accuser de jouer la comédie, de tenter un coup de poker en vu de détourner l'attention du monde de sujets plus sensibles. La rousse ne pouvait leur en vouloir: si elle semblait moins torturée que son mari, sans doute était-ce le fruit de son éloignement de New-Phoenix, et la prise de conscience de choses plus importantes, de son point de vue, dans leur vie personnelle. Mais elle ne pardonnerait pas qu'on remette en doute ses sentiments pour lui: Héres était à elle, depuis le premier jour. Tout comme elle était à lui. Ils avaient beau avoir vécut une relation des plus médiatisées - et peu propice à ce genre de dénouement - ils avaient décidé de lutter ensemble. « Ensuite...Trouver une solution pour mon père. Il va falloir que je remonte ma côte de popularité. Si je dois jamais ordonner la mobilisation générale pour contrer l'armée des Inquisiteurs, il me semble plus facile de le faire si j'ai un certain soutien. » La tâche semblait ardue mais Virginia gardait confiance: Héres n'était pas que le fils de Saevus Yaxley, il était né pour devenir un leader et cela s'en ressentait dans sa façon d'être. Si il avait put la charmer elle, alors qu'elle avait des griefs personnels contre lui, il pouvait convaincre le monde entier. Oui, Virginia en était convaincue, Héres était amené à devenir un grand nom de la scène politique et pas qu'à la simple échelle du Nouveau-Monde. « Et toi à présent, Madame Yaxley. Que comptes tu faire ? »

Quelques mois auparavant, Virginia avait confié ses doutes à celui qui était alors son fiancé. Elle avait admis être perdue quant à son futur et craignait de n'avoir, pour unique tâche, qu'à être une parure de plus pour les Yaxley. Si elle n'avait jamais douté d'Héres et de son amitié envers elle, elle n'avait jamais eut vraiment confiance en son parrain et envers les desseins qu'il avait pour elle. A cette époque, elle était prise dans un océan de doute et, entre volonté de liberté et loyauté, son coeur avait éprouvé le besoin de son confié à quelqu'un capable de comprendre ses sentiments aussi ambivalents soient-ils.  « Et bien ... Hormis être à tes côtés à chaque minutes de ce temps qui passe, je t'avoue que je suis encore perdue. » Bien sur, elle avait des ambitions: les derniers évènements lui avaient fait prendre conscience de certaines choses et son envie de ne pas être vu comme un oisillon fragile et inutile s'était renforcé. « Je ... Je pense que je vais continuer d'exercer la musique. Je ne sais peut être rien faire de particulier, mais ça, c'est quelque chose que j'ai en moi. Si j'avais été quelqu'u d'autre, j'aurais aimé donner des cours mais ... Peut être que quand le temps sera plus clément, je pourrais envisager cette option. » Elle s'était longtemps plains de ne rien savoir faire: sa mère tenait un laboratoire, son père épaulait son parrain, et à présent son mari, dans les décisions qui concernait le Nouveau-Monde. Elle, elle resterait l'artiste de la famille, celle qui continu d'éblouir. Elle espérait qu'avec le temps, son idée leur permette de se rapprocher de ces gens qui, aujourd'hui, les détestaient, pour leur faire comprendre qu'ils étaient tous humains, sur un même pied d'égalité. « Et puis ... » Son ton se fit soudainement plus hésitant. « Et je sais qu'il y a quelque chose que l'on attend de moi ... » Son plus gros challenge sans doute, mais elle n'avait pas dit son dernier mot. Ignorer si elle était capable d'avoir un enfant ne voulait pas dire qu'elle ne pouvait plus en avoir du tout. C'était le destin, et sa foi en eux, qui déterminerait leur futur. Voulant couper court aux éventuelles protestations, elle s'empressa d'ajouter « Et je ne le vis absolument pas comme une obligation ! » Elle se redressa alors, plaquant le drap contre sa poitrine d'une main, rassemblant ses cheveux sur son épaule droit de l'autre. « A vrai dire ... Savoir qu'on allait avoir un bébé, ça m'avait pas mal remuée et ... » Elle se tourna légèrement vers lui, l'observant de ses prunelles émeraudes. « J'avais l'impression d'avoir trouvé la paix avec moi même. Tu sais, je me suis toujours dis qu'il fallait que je sois parfaite pour tout le monde: pour les parents, pour le nom que je portais, pour l'image qu'on devait donner de nous lors de nos sorties publiques ... » Elle se souvenait parfaitement de cette sortie d'adolescence, quand on les avait obligé à s'afficher ensemble comme le petit couple parfait du nouveau monde. « J'ai toujours eus l'impression d'avoir un ... Je sais pas, un truc énorme sur les épaules - même si en comparant avec toi, c'est ridicule, j'en conviens ! Mais ... Savoir qu'une petite vie innocente allait dépendre de nous ... Ça m'a fait un choc. » Elle peinait à trouver les mots pour exprimer sa pensée: leur soirée avait été si heureuse jusque là, elle avait l'impression de tout gâcher. « Quand j'ai eus mon accident, je n'ai pas seulement perdu ... Enfin ... J'ai perdu une part de moi aussi. Une part de nous. Et surtout, le futur que j'avais commencé à imaginer. » Les images qui lui étaient venues, alors qu'elle était dans la voiture en direction de la tour, ne l'avaient pas quitté. Elle s'était imaginé l'annoncer à Héres, elle s'était imaginée ce bébé, ne parvenant à décider si elle préférait avoir une fille ou un fils, mais qu'elle voyait déjà, dans les bras de son promis. Elle avait eut une vision d'un futur heureux et idyllique, bien loin des temps sombres qui s'abattaient sur eux. « Ce bébé ... Je le veux toujours. Si on oublie les attentes de tout le monde ... Ce bébé de toi ... C'est sans doute le plus beau des projets. » Et cette fois, il n'y aura besoin d'aucune voiture pour le lui annoncer. Virginia se pencha alors pour embrasser l'épaule du jeune homme, elle retrouva alors son sourire malicieux et, releva légèrement la tête vers lui pour l'observer, lui chuchota « C'est la raison pour laquelle je vais te séquestrer ici ! J'ai des semaines de câlins à rattraper et ... Si je ne m'abuse, c'est la première fois qu'on a l'occasion de rester seuls ... » Un nouveau baiser sur sa joue « ... Sans chaperon ... » Elle embrassa son front « ... Et avec toutes les bénédictions que Merlin puisse nous donner. » Elle effleura ses lèvres des siennes. « A moins que la presse ne puisse vraiment pas attendre, je t'ai encore à moi pour plusieurs heures et je comptes bien en profiter. »