Tout ce qui brille…
Louise et Khaaleb

Khaaleb leva les yeux vers la pendule qui était suspendue au mur de la pièce. 16h08
Il était encore tôt, mais déjà il m’arrivait plus à se concentrer sur le document dont il était censé finir la rédaction.
La jeune femme avait fixé le rendez-vous à dix-huit heure, sans d’ailleurs imaginer qu’il puisse peut être avoir d’autre chose à faire que de se rendre à New Phoenix en pleine semaine. Ces derniers mois n’avaient pas été de tout repos, entre l’affaire avec les Inquisiteurs qui était en passe de soit se régler, soit de les foutres tous royalement dans la merde, les difficultés de gestion de certains membres des meutes qui s’inquiétaient de la situation, et puis tout simplement le contexte actuel, avec son lot de terreur et d’attentat, on ne pouvait pas vraiment dire que ça lui laissait beaucoup de temps ni pour prendre du repos, ni pour s’impliquer comme il le souhaitait dans son boulot. Fort heureusement, sa constitution robuste et sa condition de loup lui permettait de tenir la cadence et de ne plus dormir que quelques heures à peine chaque nuit, voir pas du tout, afin de tout affronter de front. Il tirait de plus en plus sur la corde, et il savait qu’un jour ça risquait de lui retomber dessus, mais pour le moment il tenait bon. Khaaleb était un idéaliste, comme une certaine personne aimait tant le lui répéter, et aussi pourrie pouvait être une journée, il s’imaginait toujours que le lendemain ne pouvait être que meilleur. Il tirait toujours satisfaction des quelques petits plaisirs que lui apportaient son quotidien archi-chargé, que ce soit de voir le directeur du département des transports magiques qu’il ne pouvait pas encadrer se vautrer comme une bouse dans le corridor de quinzième étage, ou bien encore une petite escapade sur le terrain afin de faire potentiellement tomber un odieux trafic de créatures magiques.
Poussant un soupir, le jeune homme reporta son regard sur le parchemin qui se trouvait posé sur son bureau, au milieu d’un amas de dossiers et autre document en tout genre qui n’attendait que d’être rangé, lu, classé, étudié part ses soins. Il s’agissait d’une demande de subventions afin de pouvoir finir les travaux de restauration et de réhabilitation d’un refuge pour abraxans dans le Vermont qu’il était allé visiter quelques semaines plus tôt. Le projet lui tenait à cœur, et il était plaisant de se consacrer ainsi à ce qui était son véritable métier… car après tout, c’était un diplôme de magicozoologie qui était accroché au mur juste à côté de l’horloge, pas un master en politique internationale. Et même si son poste de directeur du département ne lui laissait plus vraiment l’occasion d’être en contact direct avec les créatures magiques dont il traitait les cas, c’était toujours plus agréable que de passer des heures et des heures en tête à tête avec de vient politiciens aigris et maniérés à débattre de faits obscures. Khaaleb aimait le concret, l’action, et c’était cette raison qui l’avait poussé à ne pas envoyer de ses employé aider Louise dans son investigation sur ce possible trafic de Vivets dorés. Même s’il ignorait totalement dans quoi il allait encore foutre les pieds, il avait diablement besoin de se changer les idées, et il n’y avait rien de mieux pour cela qu’une petite sortie sur le terrain. De plus, il craignait que la jeune femme se foute encore dans la merde, comme elle avait si souvent l’habitude de le faire, et il voulait éviter de devoir une fois de plus plaider en sa faveur. Les deux jeunes gens se connaissaient maintenant depuis plusieurs années, et il ne pouvait plus compter le nombre de fois où elle s’était retrouvé dans des situations délicates, voir des démêlés avec la justice à vouloir sauver des créatures magiques, ou empêcher qu’on ne coupe tel arbre centenaire, ou protesté contre l’utilisation de fourrure naturelle dans les défilés de mode. A chaque fois le directeur fermait les yeux et soutenait son ami, allant parfois jusqu’à payer de sa poche des cautions lorsqu’elle allait trop loin. Louise était une activiste, une vraie, mais elle n’avait pas tout à fait conscience que parfois elle allait trop loin pour soutenir et défendre la cause qu’elle considérait juste. Et si Khaaleb respectait son engagement sans faille, il ne pouvait que constater qu’il ne pouvait pas faire grand-chose pour la freiner, si ce n’est l’accompagner et lui apporter son aide.

Prenant une grande plume qui se trouvait juste devant lui, il la plongea dans l’encrier ouvert et recommença à écrire, tout en continuant de penser à ce qui l’attendait le soir même.
Bien sur, le fait d’accompagner Louise pour la surveiller et l’empêcher de se retrouver une fois de plus derrière les barreaux était une des raisons qui l’avait poussé à accepter de s’impliquer dans cet histoire, mais ce n’était bien sur pas uniquement du à ça. Ce n’était pas la première fois qu’il entendait parler d’un trafic de Vivet doré sur New Phoenix, et même si ses agents n’étaient pas pour le moment parvenus à faire remonter beaucoup d’informations, il n’y avait pas de doute sur le fait que quelque chose puait dans ces bruits de couloir. Les vivets dorés étaient des petits oiseaux de forme sphérique initialement originaires d’Europe du Nord et qui avaient la particularité de voler extrêmement vite et de changer de direction avec une habilité et une rapidité déconcertante, ce qui en faisait depuis le treizième siècle, des « balles » idéales dans les parties de quidditch. Fort heureusement pour l’espèce qui se voyait alors menacée d’extinction, leur utilisation fut interdite un siècle plus tard pour remplacé par des vifs d’or (qui reproduisent d’ailleurs leur façon de voler). Depuis cet époque, les vivets dorés étaient protégés, et ce partout dans le monde. Leur vente était extrêmement contrôlée, les très rares élevages relevant de l’autorité du Ministère, et leur capture à l’état sauvage parfaitement interdite et punissable d’une lourde amende et d’une peine de prison de six mois. Mais malgré cela, quelques petits rigolos continuaient à essayer de s’en procurer sous le manteau afin de rendre leur match plus « dynamique », ou encore pour quelques parties de chasse à dos de balai. En temps que directeur du département de contrôle et de protection des créatures magiques, c’était quelque chose que Khaaleb ne pouvait permettre. Et si vraiment il y avait un réseau de trafic qui sévissait à New Phoenix, il devait tout faire pour le démanteler.

Traçant les derniers mots sur son parchemin, le jeune homme le signa avant d’y apposer le tampon du département. Puis, après avoir jeter un dernier regard vers l’horloge et glissé dans sa poche le bout de carton que Louise lui avait envoyé avec l’adresse de la boutique où ils devaient se retrouver, il se leva et sortit de son bureau. Après avoir refermé et verrouillé la porte derrière lui, il se tourna vers un bureau qui se trouvait tout proche et qui se trouvait être celui de son assistante. La jolie blonde était penchée sur une pile de dossier, le regard dur et les sourcils froncés. Lorsque son patron s’approcha, elle ne leva même pas le regard vers lui et se contenta de tendre la main pour y recevoir le parchemin dont il venait de finir l’écriture.

« Pour le service Gestion et Intendance s’il vous plait, avant la fin de la journée si possible.
-Bien Monsieur T.
-Je ne vais pas tarder…est ce que vous avez ce que je vous ai demandé ?
-Oui Monsieur T. tout est dans cette pochette. » Dit-elle en lui tendant une chemise bordeaux à son patron.

Ouvrant le dossier, Khaaleb y trouva tout ce dont il avait besoin : documents traitant des vivets doré, ainsi que les quelques relevés et enquêtes qui avaient pu être fait ces dernières années sur des trafics divers, ce que soit sur les vivets ou autres créatures magiques dans les alentours de New Phoenix. Satisfait, le jeune homme referma la pochette et après avoir remercié son assistante pour son travail toujours exemplaire, il se détourna et sortit du département. Mais contrairement à ce qu’on pouvait croire, il ne prit pas immédiatement le chemin des zones de transplanage, préférant s’enfoncer un peu plus profondément dans les méandres du ministère pour se rendre au service Potions. Le ministère de la magie avait une organisation complexe. Les différents départements se répartissaient la gestion des différentes faces du monde magique, mais il fallait bien plus que ça pour faire tourner la boutique. Il y avait donc au sein du même bâtiment un grand nombre de Services et sous-services, auxquels étaient dévolus d’autres tâches de gestions internes, tels que le service de Gestion et Intendance, celui de Sécurité, d’Entretient des locaux, et depuis quelques temps déjà, le service des Potions, dont le rôle allait de la création du meilleur produit détachant pour les sols du bâtiment, à la création de la potion la plus complexe. Cette dernière particularité était d’ordinaire réservée pour les aurors qui travaillaient ici, mais depuis qu’il avait monté une cellule d’enquêteurs spécialisés dans les créatures magiques au sein de DCPCM, eux-mêmes y avaient accès.
Entrant dans le service, il fut heureux de le voir presque vide, hormis quelques maîtres des potions qui travallaient dans leur coin et qu’il salua d’un geste. Les deux hommes qu’il connaissait fort bien lui répondirent par un sourire, ayant les mains occupées par l’extraction de suc de fèves sopophiriques. Arrivant au niveau du comptoir, il fut très vite rejoint par une magnifique femme d’une bonne quarantaine d’années avec qui il avait pris l’habitude de flirter. Après quelques mots doux échangés, la chef du service sortit une petite clef et alla vers une armoire qui se trouvait dans un coin du laboratoire, en sortant une flasque en argent qu’elle ramena avec elle et qu’elle confia au jeune directeur. Ce service était vraiment au-delà du pratique.

« Merci Martha… j’ignore comment j’aurai fait pour trouver du polynectar à une heure pareil… »

Car oui, la flasque qu’il tenait à présent dans ses mains contenait plusieurs doses de cette potion si difficile et dont l’usage était hautement réglementé. Il fallait d’ailleurs un certain niveau d’accréditation au sein du Ministère pour prétendre en demander au service Potion, mais heureusement pour lui et pour leur affaire, il avait depuis longtemps le grade requis. Il s’était longuement demandé s’il était vraiment nécessaire de changer ainsi d’apparence, mais quand on fait 1m95 et qu’on est le directeur d’un département qui cherche justement à mettre fin à toute forme de trafic de créature magique… mieux valait ne pas prendre de risque et de tout faire pour passer inaperçu.
Un coude posé sur le comptoir, il jeta un rapide coup d’œil au classeur que la dénommée Martha lui présentait et où se succédait différents portrait d’hommes et de femmes avec leurs différentes aptitudes. Ces fausses identités que pouvaient prendre les agents du ministère étaient bien sur extrêmement contrôlées et régulièrement renouvelée, ce qui donnait un catalogue de possible tout à fait intéressant.

« Mmmm je ne sais pas, qu’est ce que tu me conseilles ? J’en veux un plutôt banal, qui passe partout, mais quand même assez athlétique, je ne sais pas trop à quoi m’attendre… »

Après être enfin tombé d’accord sur le parfait candidat, on le conduisit à une petite pièce dans laquelle il trouva des vêtements civils assez communs et un grand miroir en plein pied. Une fois la potion avalée et le goût infâme passé, il pu constater toute l’efficacité du breuvage en voyant en quelques instants seulement son visage et tout son corps changer. L’effet de cette potion était toujours aussi saisissant. Sans perdre de temps, il se déshabilla et enfila les vêtements qu’on avait prévus pour son personnage. Quittant la cabine de transformation, on lui fournit de nouveaux papiers d’identité. Après avoir glissé sa baguette dans la poche prévue à cet effet, il épingla une insigne argentée aux armoiries du ministère à l’intérieur de sa veste, et après un dernier clin d’œil à la charmante Martha, quitta le service.

Après un transplanage rapide et bien mené, il atterrit à New Phoenix. La chaleur d’été régnait encore dans la capitale des Partisans, et il regretta bien vite la douceur de l’air bostonnien. Levant les yeux vers le coin de la rue, il constata qu’il était exactement là où il l’avait prévu, c'est-à-dire à un bloc de la fameuse boutique où il avait rendez-vous. Mettant les mains dans les poches, il se mit à marcher en direction de la rue en question, essayant de prendre rapidement contrôle de ce nouveau corps auquel il n’était pas encore habitué. L’homme en question était plutôt bien bâti, mais était immanquablement plus petit que lui (en même temps c’est pas dur), ce qui lui donnait une impression assez étrange d’avoir rapetissé. Tournant la tête vers la vitrine d’une boutique à côté de laquelle il passait, il pu voir son reflet et n’y vit que celui d’un homme tout ce qui y avait de plus banal. Brun, cheveux courts, les yeux marrons, pas de barbe ni de moustache, ni aucun autre signe distinctif. Il n’était personne.
Arrivant enfin au niveau de la boutique, il y entra sans s’attarder, comme s’il avait toujours prévu d’y venir pour acheter quelques choses. Jetant un rapide coup d’œil dans la boutique dans laquelle il y avait encore pas mal de client malgré la fin de journée, il remarqua immédiatement Louise qui était en train de fouiller semblait-il à la recherche d’un nouveau maillot. La jeune femme n’était pas difficile à reconnaitre avec ses cheveux blancs, aussi s’approcha-t-il discrètement d’elle, faisant mine de regarder avec intérêt la toute dernière sortie de la Compagnie des Balais Brossdur.

« Pfffff sérieux… un maillot des Farfadets de Seatle… cette équipe craint. » dit-il à mi-voix, qui était d’ailleurs toujours la sienne, et ce malgré le polynectar.