I hope you'll be there
Virgi & Héres

Héres n'avait jamais réellement compris les bienfaits des rendez-vous incessants de son père. Petit garçon, il avait longtemps cru - mais heureusement il ne l'avait jamais partagé avec le concerné, sinon il se serait clairement fait remonter les bretelles d'avoir été si stupide - que le métier de son papa était "avoir des rendez-vous". Combien de repas avait-il manqué ? Combien de fois Priscius et lui mangeaient seuls avec leur mère ? Ce n'était pas désagréable loin de là et puis, bientôt, Saevus Yaxley allait commencer à éduquer son fils à l'avenir qui lui était promit, éducation qui allait permettre à l'aîné de passer plus de temps avec le chef de famille.
Cet avenir était arrivé plus vite qu'Héres ne l'aurait cru. C'était lui à présent qui enchaînait ces cruciaux rendez-vous pour tenter de rattraper le chaos qu'avait provoqué les terribles révélations, l'enlèvement de leur leader et l'abandon de celui-ci.
Et aujourd'hui, il comprenait l'importance de ces face à face. Les mains qu'on serre, les sourires, les si longues discussions où il se devait de rester convainquant et passionné pour obtenir ce qu'il désirait pour sa communauté.
Il avait longtemps attendu une révolution du peuple qui l'aurait destitué de la chaise du leader des partisans. Mais elle n'était jamais venue. Et même, depuis son mariage secret avec Virginia, sa popularité avait sensiblement augmenté. Ce n'était pas étonnant, l'amour attirait toujours la sympathie des gens. Et celui qu'il partageait avec son épouse était réel malgré tout  ce qu'on pouvait croire.
Il avait appris à aimer la jeune femme. Doucement mais sûrement.
Alors lorsqu'elle avait perdu leur bébé, il avait triplement souffert : pour la vie qui s'en allait sans avoir connu le monde, pour lui qui perdait son enfant mais surtout, surtout pour Virginia qui subissait trauma après trauma.
S'unir pour la vie seuls, sans leurs parents, était la preuve d'une envie de renouveau, d'un besoin de simplicité. Héres sourit en se frottant les yeux. Il devait vite finir son compte-rendu de son dernier rendez-vous avant de pouvoir la rejoindre.
Il avait tellement de choses en tête et s'appliquait à se construire un réseau sûr de conseillés. Si Héra ne l'appréciait pas réellement, il avait véritablement confiance en Invictus dont les explications étaient précieuses.
Cependant, se construire un réseau alors que beaucoup de dossiers urgents traînaient sur son bureau était compliqué. Il y avait le Cercle et l'enquête des factions dont Thémis Baldwin et Elijah Fernandes étaient les représentants. L'enlèvement des dix moldus dans le gouvernement et l'ultimatum de ce groupuscule terroriste. Les relations avec Washington. Les relations tendues avec les autres communautés. Et puis Zach aussi. Son ami avait disparu depuis si longtemps et voir son oncle se tuer à la tâche pour faire bouger les choses lui renvoyait une image de lui peu flatteuse.
Zachary était le lien entre le professionnel et le personnel. Car personnellement parlant, beaucoup de choses continuait d'angoisser le jeune homme : il ne s'était pas fait encore à l'abandon de son père. Il était terrifié que Virginia lui cache sa souffrance et ne puisse avancer. Il avait cette peur inavouée que son frère ne devienne un Victor Yaxley. Et puis sa mère, seule et enceinte. Tenait-elle le coup ?
Quand est-ce que le monde était-il devenu si compliqué ?

Satisfait de ce qu'il avait accompli aujourd'hui, il se leva et s'étira. Puis, pressé de rentrer chez lui, il quitta son bureau pour rejoindre leurs appartements. Dans les couloirs, Héres se demanda depuis combien de temps il n'était pas sorti des Tours. La soirée d'Imane Khazen arrivait dans son planning, ça serait l'occasion.

Le sourire de la jeune femme qui l'accueillit lui fit oublier à quel point il était vital qu'il recommence à sortir. Elle l'embrassa chastement sur les lèvres avant de lui demander comment c'était passé sa journée. Héres ne put retenir un bâillement mais il lui rendit son sourire.

-Bien. Ca n'a pas arrêté aujourd'hui.

Il lui expliqua brièvement les rendez-vous de sa journée, brièvement car il craignait toujours de l'ennuyer. A présent assis tous les deux dans le fauteuil qui leur offrait la plus jolie vue sur New-Phoenix, elle lui servit une tasse de thé.
Après avoir monopolisé la parole pendant quelques minutes, il lui demanda.

-Et toi ? As-tu passé une bonne journée ?  

Le récent froid entre sa mère et elle n'avaient pas amélioré le quotidien de la belle. Il s'en voulait un peu de ne pas avoir su arranger les choses. Que pouvait-il y faire ? Héra allait finir par s'y faire et pardonner aux enfants comme Lyra avait su le faire. Sa mère avait été déçue de ne pas être présente évidemment.
Mais elle avait compris au fond.
Enfin c'est ce qu'il pensait.

I hope you'll be there
Virgi & Héres

L'attention d'Héres se focalisa sur sa jeune épouse - il est étrange de dire cela lorsqu'elle a quelques années de plus que lui - alors qu'elle lui racontait les dernières nouvelles. Héra avait contacté sa fille pour lui proposer de manger ensemble une glace le lendemain.
Cette information tiraillait l'héritier : il était d'abord heureux que sa belle-mère agisse enfin pour tenter de recoller les morceaux. Pour lui, elle avait mis beaucoup trop de temps à le faire, mais connaissant Madame Rookwood, cela n'était pas étonnant. Il était également et immédiatement anxieux à l'idée d'une rencontre entre les deux femmes. Héres avait bien compris qu'Héra ne le portait pas trop dans son coeur et il craignait toujours qu'elle parvienne à monter la tête de son unique enfant contre lui.
Rationnellement, il savait que c'était improbable. Pourtant, le jeune garçon peut sûr de lui n'avait pas complètement disparu du jeune homme leadant leur communauté.

-C'est bien. Tu appréhendes ? Demanda-t-il.

Depuis combien de temps ne s'étaient-elles pas parlé ? Est-ce que sa mère lui fera la leçon ou saura-t-elle garder son sang froid pour retrouver un lien mère/fille ?
Il n'y avait qu'une seule et unique chose dont Héres était certain à propos d'Héra : elle aimait sa fille plus que tout.

La conversation prit ensuite une autre tournure et le coeur du jeune homme accéléra dangereusement en l'entendant lui avouer qu'elle s'ennuyait.
Il la laissa parler et lorsqu'elle sembla avoir dit le principal de ce qu'elle avait sur le coeur, il lui prit la main et lui offrit un sourire attendri.

-Pourquoi imaginer ? Rien ne t'empêche de te lancer ! Nous pouvons lister tes centres d'intérêts et les mixer aux offres d'emploi, déclara-t-il avec enthousiasme.

Le jeune Yaxley n'avait pas réfléchi à deux fois. Son épouse désirait travailler, elle travaillerait. Il était prêt à lui décrocher la lune s'il fallait. De plus, il savait ce que l'ennui dans un  couple pouvait provoquer. Il se sentit chanceux qu'elle lui ait avoué si vite qu'elle l'enviait parfois. Cette envie aurait pu se transformer en rancoeur bien vite...

-Je suis heureux que tu m'en parles. Et crois-moi, nous allons te trouver quelque chose de bien. Je peux évidemment te faire entrer dans le personnel de la Tour mais je pense qu'il serait plus malin de voir un poste en fonction de ce que tu aimes...

Déjà, Héres réfléchissait à ce que son épouse aimait faire : lire le soir. Un métier parmi les bouquins ? Elle rêvait de voyager, ce que son mari était bien incapable de lui offrir depuis le Dôme.
Que pouvait lier les voyages à la lecture ? Depuis dix ans, le marché des voyages avait plongé avec l'incapacité de pouvoir le faire : à quoi bon acheter des guides de voyages lorsqu'on ne pouvait plus quitter le sol des Etats-Unis ? Mais le pays était grand. Il était possible de travailler pour un guide touristique du territoire américain.
Est-ce que son épouse aimait écrire ? Il n'en savait rien...
Héres réfléchissait aux options qu'il pouvait lui offrir dans la Tour mais rien de bien intéressant lui venait en tête.

-Quoique tu veules faire, sache que je serai toujours derrière toi. Je comprends que tu puisses t'ennuyer ici. J'espère que tu m'excuseras de ne pas l'avoir compris auparavant.