Elle ouvrit les yeux difficilement, elle avait l'impression d'avoir été écrasée par un troupeau de sombrals et peinait à retrouver ses esprits. Autour d'elle, l'ambiance impersonnelle d'une chambre d'hôpital, l'impossibilité de bouger et les souvenirs qui revenaient peu à peu. Tous plus douloureux tant physiquement que moralement. Tout lui semblait flou. Elle ne se souvenait que vaguement la raison de sa présence dans la voiture: elle allait voir Héres. Elle avait quelque chose de très important à lui dire, quelque chose qui ne pouvait attendre le lendemain ou même qu'il ait fini de travailler. Il fallait qu'elle le voit. Mais elle n'arriva jamais à la Tour. Sa main bougea légèrement, ignorant toutes ces machines auxquelles elle était reliée et se posa sur son ventre. Le renflement des pansements lui arrachèrent quelques larmes. Ce fut à ce moment que la porte s'ouvrit sur une longue chevelure rousse. Sa mère. Héra Rookwood s'approchât du lit de sa fille, caressant ses mèches flamboyante, les yeux encore humides. « Ma chérie ... Comment te sens tu ? » Sa voix était douce, calme mais inquiète et Virginia tenta de la rassurer mais aucun mot ne parvenait à sortir. Elle voulut se redresser mais fut vite recouchée, terrassée par une douleur aigüe provenant de son abdomen. Héra paniqua, berçant sa fille du mieux qu'elle le pouvait « Chut ... Ne bouges pas, tu risque de rouvrir ta blessure. » Elles restèrent ainsi quelques minutes en silence, à se regarder dans les yeux, Virginia souhaitant revenir à cette époque où, petite fille, elle se laissait câliner, bien loin des soucis qu'elle avait aujourd'hui. Ce fut Héra qui brisa le silence, trouvant quelque part la force de demande « Ton père et moi étions morts d'inquiétude ... Tu te souviens de ce qu'il s'est passé ? » Le visage d'Héra se ferma alors qu'elle expliquait à la jeune femme que son père était parti quelques minutes auparavant, souhaitant rassurer leurs proches. Quand elle lui raconta les premières constatations des autorités sur l'accident, les souvenirs de Virginia resurgirent.

Elle devait profiter de leur absence pour aller le voir. C'était important. Mille fois plus important que n'importe quel rendez vous. Elle sortit du manoir, fermant derrière elle en l'absence de l'employée de maison. Le chauffeur de la famille avait fait préparer la voiture: elle ne se sentait pas de faire le trajet à pied et seule ... Quand au transplanage ... Elle n'avait jamais aimé ça. Elle lui sourit, reconnaissante qu'il se soit déplacé exceptionnellement pour elle, et prit place à l'arrière de la voiture. Ils discutaient souvent, lorsqu'elle était sa seule passagère et cette fois ci ne faisait pas exception à la règle. Soudain, la voiture pila brusquement, un horrible bruit de métal l'assourdit et elle sentit le sol l'accueillir alors que son corps devenait douloureux. Le reste était flou. Trou noir. Elle ouvrit les yeux, observant la fumée qui envahissait la route. Trou noir. A quelques mètres d'elle, il y avait le corps inanimé de l'employé de la famille, du sang sur le bitume. Trou noir. Elle avait mal. Trou noir. Elle entendait des voix. Elle entendait son nom. Puis. Plus rien.

Virginia n'osait pas poser la question qui la taraudait. Et Lui. Etait-il venu ? Etait-il repartit ? Le regard d'Héra se fit plus dur, comme si les interrogations mentales de sa fille parvenaient à son esprits. Virginia sentit l'étreinte de sa main se resserrer « Virginia ... Dis moi ... Tu étais au courant ? » Son coeur rata un battement. Alors, finalement, elle l'avait apprit. La jeune femme baissa les yeux, hochant la tête faiblement. Bien sur qu'elle le savait. Comment aurait-il put en être autrement. C'était la raison de sa présence dans la voiture. « Je suis désolée ma chérie. » Nouveau silence. Elles ne se regardaient plus. Virginia les yeux fixés sur la fenêtre observait l'obscurité de la nuit, ne parvenant pas à croire à ce qui lui arrivait. « On ne lui a rien dit. Il attend dans le couloir ... Mais si tu veux je peux ... » Le premier mot de Virginia fut sans appel: tranchant et glacial. « Non. » Héra sursauta et acquiesça silencieusement. Elle se releva, déposa un dernier baiser sur le front de son unique enfant et quitta la pièce. La porte s'ouvrit de nouveau et la silhouette d'Héres apparut, soulageant l'appréhension de Virginia sans pour autant calmer son coeur battant. C'était l'heure de vérité. Elle ne pourrait pas lui cacher très longtemps ... Il s'installa près d'elle. La où se trouvait sa mère, quelques minutes auparavant, mais ce ne fut qu'après cinq minutes que la rousse tourna la tête vers lui, dévoilant ainsi les larmes qui avaient réussit à se frayer un chemin sur ses joues. « Héres ... Je suis désolée ... » Elle s'effondra dans les bras de son fiancé sans plus d'explication, craquant sous la pression de ce que cet accident lui avait couté.

Virginia avait toujours été une jeune femme souriante en toute circonstance mais à l'heure actuelle, elle avait l'impression de n'être que l'ombre de ce qu'elle avait été. Le son régulier de l'appareil auquel elle était branchée venait briser le silence de la chambre d'hôpital. La voix d'Héres apaisait un peu sa peine: elle se sentait bien, en sécurité près de lui. Il était sans nul doute la personne qu'elle désirait le plus voir, à son réveil. Mais les mots n'arrivaient pas à sortir. Elle avait l'impression que son corps refusait de lui obéir.  « Ma chérie...Ma chérie, ce n'est pas de ta faute. Le chauffeur du poids lourd s'est endormi au volant. Paul n'y est pour rien...Il est mort sur le coup, il n'a pas souffert d'après les médecins. » Le corps sans vie de l'homme lui revint en mémoire. Elle se souvenait à voir tenter de ramper vers lui, mais la douleur était trop grande pour pouvoir faire le moindre mouvement. Ainsi, il était mort sur le coup ... Cela apaisait un peu sa culpabilité: dans un sens, c'était sa faute s'il ne rentrerait pas chez lui ce soir. Elle s'accrochait au cou d'Héres, continuant de pleurer alors qu'elle sentait la main du jeune homme dans ses cheveux. Elle s'en voulait encore plus de ne pas réussir à lui dire que la mort de son chauffeur de représentait pas le pire dans cette histoire.  « Chuuut, calme toi Virginia...Je suis là. » Elle se mit à trembler: il était là maintenant, mais le serait-il toujours lorsqu'il saurait ? Elle prit sa main dans la sienne, reculant un peu pour lui parler.


Cela faisait quelques jours qu'elle était malade. Depuis sa visite au bureau d'Héres, elle avait de plus en plus de vertige et avait beaucoup de mal avec la nourriture: l'odeur lui donnant la nausée. Par chance, sa mère était en déplacement et son père était très occupé avec le travail. Un soir, elle avait prit son courage à deux mains et avait profiter du départ de la gouvernante pour consulter le grimoire de soin élémentaire que sa mère gardait précieusement dans la bibliothèque. Après deux heures de test, elle laissa tomber sa baguette abasourdie par ce qu'elle venait d'apprendre. Elle n'avait jamais vraiment fait attention, elle n'y avait jamais réellement pensé ... Qu'allait-elle faire ? Héres était impliqué lui aussi. Elle devait lui dire. Mais comment ?


Elle n'arrivait pas à le regarder en face. Si seulement elle n'avait pas autant attendu, si elle avait trouvé le courage de lui dire, lorsqu'ils s'étaient vu quelques jours après sa découverte. Elle caressa le dos de la main du jeune homme, hésitant encore. Après tout, si elle ne disait rien, il ne le saurait jamais. Mais ce n'était pas honnête: ça le concernait, il avait le droit de savoir ... Inspirant profondément, elle s'apprêta à déverser son sac.  « Héres ... Tu ne comprends pas ... Je ... C'est plus compliqué que ça. »  Le grand déballage était arrivé. Peut être qu'elle se sentirait mieux si elle lui confiait ce qui la blessait autant. Peut être qu'ils pourraient remonter la pente à deux ... « Il y a quelques jours, j'étais malade, c'est pour ça que j'ai annulé notre rendez-vous. J'étais prise de vertige de plus en plus souvent et je supportais mal les petits trucs de la vie quotidienne. En fait ... » Elle inspira de nouveau, ayant l'impression que son coeur allait éclaté. « J'ai appris que j'étais enceinte. » Elle se tut quelques secondes, lui laissant le temps d'assimiler la nouvelle. La suite semblait évidente. Elle s'était réveiller une première fois dans l'ambulance qui l'emmenait à l'hôpital puis une seconde fois, quelques heures plus tard, juste avant l'arrivée de sa mère. Elle avait put échanger deux mots avec le médecin avant qu'elle ne quitte la salle de réveil pour retourner dans sa chambre.


Elle avait l'impression d'être dans du coton. Ses yeux s'entrouvraient sans jamais réellement se fixer quelque part et une vague silhouette apparut dans son champ de vision. « Mademoiselle Rookwood. Tout va bien, vous êtes hors de danger. Malheureusement ... »


Elle frissonna alors que la scène lui revenait en mémoire. Elle s'en voulait affreusement. Dans l'accident, un morceau du toit de la voiture l'avait transpercé. Oui cet accident lui avait couté cher. Elle avait perdu leur enfant.

Elle sentait coeur se briser alors que le visage d'Héres laissait entrapercevoir toute la peine qu'il ressentait pour cet enfant qu'ils auraient du avoir. Elle ne l'avait presque jamais vu triste: il gardait généralement un air indifférent, se moquant de l'agacement que provoquait, chez la jeune femme, cette attitude. A vrai dire, elle la seule fois où elle l'avait vu dans un tel état remontait à dix ans en arrière, peu après l'annonce de leurs fiançailles. Elle se souvenait vaguement de cette période: elle était restée enfermer dans sa chambre pendant trois jours avec Olivia, sa meilleure amie. Lorsqu'elle avait, enfin, accepter de sortir, il était venu vers elle et elle l'avait violemment repoussé, lui disant des choses plus horrible les unes que les autres, oubliant qu'il était, lui aussi dans un sens, victime de cet arrangement. Après des mots et des mots, elle avait touché un point sensible, un truc à ne pas dire et il était partit alors qu'elle regrettait ses paroles. Aujourd'hui encore, elle culpabilisait énormément et cet évènement tragique ne venait rien arranger à la situation. « Ce n'est pas de ta faute. » Bien sur que oui c'était sa faute. Elle était pleinement responsable de la mort de deux personnes: si elle était restée sagement chez elle, qu'elle avait attendu qu'il vienne plutôt que de se précipiter comme une idiote ... Paul serait chez lui, avec sa femme et elle serait en train d'annoncer la nouvelle à Héres ...  « Ecoute moi, nous aurons le temps d'en faire d'autres des enfants. En l'honneur de celui-ci.. » Elle ignorait si elle en était capable. Pas uniquement moralement: le temps apaisant toutes les peines, mais physiquement. Le débris de métal l'avait transpercé de part en part: qui savait quels dégâts il avait put commettre de plus ... Et si elle n'était plus jamais capable d'avoir un enfant ? Si ne pouvait pas donner à Héres, et aux Yaxley, l'hériter qu'on attendait d'elle ? La perte de ce bébé remettait beaucoup plus de chose en question qu'elle ne l'avait imaginé. C'était sa vie toute entière qui risquait de finir en poussière car après tout, si elle avait accepté ses sentiments pour le jeune homme, peut être qu'ils n'étaient pas réciproque ? Il n'y avait jamais eut ce genre de parole entre eux et la rousse ignorait le point de vue de son fiancé sur le sujet. Si elle n'était plus capable d'avoir un enfant, ce mariage était-il toujours d'actualité ? Et quand bien même il voulait encore d'elle, son parrain prendrait-il le risque de maintenir cette union ?

Quelques années auparavant, elle aurait été ravie de pouvoir se débarrasser de ce mariage, mais aujourd'hui, beaucoup de chose avait changé ... La main du brun se resserra autour de la sienne, lui transmettant, à travers ce geste, un peu de chaleur.  « A présent, il faut te reposer. Reprendre des forces. Pour que cet horrible accident soit derrière toi. Derrière nous.. » Elle hocha la tête faiblement, se laissant retomber sur les oreillers en soupirant. Elle peinait à bouger et pourtant, elle n'en pouvait déjà plus d'être enfermée ici. Une main toujours dans celle du jeune, elle reposa sur son ventre, espérant que la simple présence d'Héres pourrait apaiser la peine qu'elle ressentait. Si seulement il avait put être là ... « Tu sais ... Je n'étais peut être pas enceinte depuis longtemps et je sais que nous ne sommes pas encore mariés et que ça aurait été mal vu mais ... J'aurais vraiment aimé le garder. » Il ou elle serait né en été si ses calculs étaient exacts. En vérifiant les dates, elle était venue à la conclusion qu'elle était tombée enceinte à la soirée du réveillon. Dans la voiture, quelques heures plus tôt, elle s'était surprise à penser que c'était une drôle de coïncidence. Elle se souvenait parfaitement de cette soirée là.



C'était une soirée mondaine comme les autres, si on retirait les décorations de Noël qui fleurissaient un peu partout dans la grande salle. En cette période de l'année, on recevait beaucoup pour des oeuvres de charités, des appels de dons: les gens sont bien plus généreux pendant les fêtes ... Virginia s'ennuyait à mourir, elle s'était installée à une table, dans un coin de la pièce, et sirotait son verre avec un air de lassitude plaqué sur le visage. Après avoir salué les quelques personnes importantes dont on attendait un gros chèques à la fin de la soirée, elle avait entreprit de chercher Olivia ou Héres, ou n'importe qui ayant moins de quarante ans et ayant une folle envie de s'amuser. En vain. Olivia était en voyage, et Héres suivait son père comme son ombre, prenant son rôle d'héritier très à coeur. Elle le trouvait attachant: elle adorait le voir en plein "situation de travail". Il lui arrivait de squatter son bureau juste pour voir son petit air concentré qui la faisait craquer. Dès qu'il entrait dans son champs de vision, elle ne pouvait s'empêcher de l'allumer: elle s'ennuyait à mourir et provoquer Héres lui semblait une excellente idée.
Un peu plus tard, alors qu'elle cherchait un moyen de quitter cet endroit, prétextant une session de "repoudrage", elle quitta la salle pour se rendre dans le couloir adjacent. Au fond de ce dernier se trouvait Héres. Elle sourit, se disant qu'il la connaissait trop bien. Alors qu'elle l'embrassait, déboutonnant déjà sa chemise, elle sentit la porte contre laquelle il venait de la plaquer s'ouvrir. Avec un sourire au lèvres elle se dit que la soirée n'était pas si mal que ça finalement ...



Il semblait bien loin, l'époque où leurs seuls peurs étaient de se faire surprendre, d'entacher la réputation d'enfants parfaits, de couple parfait ... Elle ignorait s'il y aurait des rumeurs sur ce qu'il venait de sa passer, ils avaient besoin de se reconstruire. Virginia voulait partir: loin de cet hôpital, loin de New Phoenix. Elle voulait aller dans un endroit qui ne lui rappellerait pas sa douleur. « Au final, ce n'est pas ça» elle appuya leurs mains contre son ventre « qui fait le plus mal. » Elle hésitait. Ils n'avaient jamais parler sentiment ... « Héres ... C'est pas dans ces circonstances que j'aurais voulu te dire ça. » Aucun des sujets qu'ils abordaient à cet instant n'auraient dut être abordé dans ces circonstances. « Je comprendrais que tu ... enfin ... On a aucune garantie que je puisse ... A nouveau ... » Elle respirait difficilement. C'était dur, pour elle, de laisser à Héres le choix de rompre leur fiançailles. Elle ne voulait pas qu'il s'oblige à rester avec elle, qu'il aille voir ailleurs et qu'il revienne, un jour, avec l'enfant d'une autre ... Elle préférait encore le laisser reprendre sa liberté. « Mais je voulais que tu saches que ... Enfin ... Je ...» Je t'aime. Elle ne pouvait plus le lui dire. Elle avait brisé bien trop de chose ce soir.

« Je t'aime. » Les mots qu'elle avait tant désiré entendre de sa part. Enfin. Pourtant tout ceci lui paraissait irréel: lui, son état, les multiples fils qui la reliait aux machines de l'hôpital et ce son, toujours aussi régulier et strident qui s'accéléra soudainement, dévoilant au jeune homme l'effet de sa révélation. Foutus engins moldus ! Si elle voulait paraitre détachée, c'était raté. Elle se contenta de rester paralysé par ce je t'aime inespéré, ne parvenant tout bonnement pas à y croire.  « Je t'aime et je te garde. » Se rendait-il compte de ce qu'il disait ? Lui qui était, d'habitude, si raisonnable et réfléchis. C'était son style à elle de foncer en ce moquant des conséquences ... « Héres ... Je ... » Elle savait que tout cela ne dépendait pas d'eux et, dans l'état actuelle des choses, elle ne parvenait pas à voir le positif. Elle le vit fouiller sa poche à la recherche de quelque chose avant qu'il ne ressorte sa boucle d'oreille. Celle qu'il lui avait prise dans la bibliothèque, quelques jours auparavant. La brandissant sous ses yeux, il reprit d'un air affirmé « Je crois en nous. » Elle sentit les larmes menacer de refaire surface alors qu'elle constatait combien le moment pouvait l'émouvoir. Elle esquissa un faible sourire, constatant avec joie qu'il n'avait plus rien du petit garçon qu'elle avait put connaitre, ni même de l'adolescent grandissant dans l'ombre de son père: elle avait l'impression que, pour la première fois, elle le voyait lui. Rien que lui, d'une manière totalement nouvelle. Contre toute attente, la perte de leur enfant semblait les rapprocher et le cauchemar de Virginia prenait une toute autre tournure. Elle le laissa embrasser ses mains et continuer de lui murmurer ses paroles rassurantes qui réchauffait un peu son coeur « Les chances de devenir parents, si jamais elles sont minces, et bien moi, j'y crois. Et toi ? » Elle hésita quelques secondes avant de balayer toutes les idées noires que son esprit avait put emmagasiné depuis son réveil. Si Héres y croyait, alors elle devait y croire aussi: elle lui faisait confiance, il ne se trompait jamais. « Oui. D'accord. » Elle lui sourit à nouveau. « Mais promets moi une seule chose ... » Elle aurait put rire de son air interrogatif: il était tellement mignon à cet instant. « Ne me laisse plus seule  ... Ne m'abandonne pas ... »

Elle se redressa à nouveau, ignorant la sensation désagréable qui lui rappelait qu'elle était tout de même mal en point, et l'enlaça, entourant sa taille de ses bras pour venir poser sa tête sur son épaule. Elle soupira de bien être: il n'y avait pas à dire, quand il était là, elle devenait une autre personne. Elle craignait de se retrouver seule, à présent. Elle savait qu'il ne pourrait pas rester à son chevet jusqu'à sa sortie de l'hôpital mais elle ne voulait pas penser à l'instant où elle se retrouverait seule. Il lui donnait la force de passer à autre chose et, une fois qu'il serait parti, elle savait que ses démons reviendrait la hanter. « Qui aurait cru que nous tomberions amoureux l'un de l'autre ? Les chances n'étaient pas si élevées que ca et pourtant, regarde nous...» C'était à peine un chuchotement, un murmure qui la fit sourire encore plus. Même si la perte était grande, aujourd'hui, elle avait l'impression d'y avoir gagné quelque chose. Le destin n'avait pas voulut qu'elle garde son enfant, mais en contrepartie, elle savait qu'elle avait gagné le coeur de son fiancé, tout comme lui possédait le sien depuis un moment. « Cela n'aurait jamais put être quelqu'un d'autre que toi ... » C'était une évidence. Comment serait la vie sans lui ?

Pendant les quelques minutes où Héres sortit de la chambre Virginia se sentit désorientée. Depuis son réveil, il y avait toujours eut quelqu'un pour lui parler: les médecins, puis sa mère et enfin son fiancé. Se retrouver soudainement seule avec ses souvenirs lui procurèrent une horrible sensation de vide. Elle détestait devenir aussi dépendante de la présence des autres, surtout de celle du brun. De plus, elle ne parvenait à occulter de son esprit la petite voix qui lui disait qu'elle ne serait qu'un boulet pour Héres. Si la présence du jeune homme avait put étouffer ce sentiment d'impuissance, son actuelle absence avait permit à ces idées noires de revenir telle une fanfare dans l'esprit fragile de la rousse. Passé le moment romantique de la déclaration d'Héres, il ne restait à Virginia que le sentiment d'être devenue totalement inutile: elle n'avait ni vrai métier, ni intérêt pour ses affaires et avec cet accident, elle réduisait leur chance de concevoir un héritier. La rousse remonta ses jambes contre sa poitrine, appuyant ses bras contre ses genoux, son visage se fondant dans ses mains ouvertes. Qu'allait-elle devenir ?  « Jamais je ne t'abandonnerai Virginia... » Elle eut un sourire tendre alors que la voix d'Héres résonnait encore à ses oreilles. Sourire qui s'effaça quand une toute autre voix prit le dessus. « Et que lui apporteras-tu ? Toi qui n'es même pas capable de mener une grossesse à terme ? » Elle étouffa un sanglot, ravalant les larmes qui menaçaient de revenir couler le long de ses joues. Relevant la tête, elle observa les machines auxquelles elle était branchée. Elle ressentait le soudain besoin de partir, de sortir de cette pièce et de partir loin. « Tu es d'une lâcheté ... Tu ne le mérites pas. Tu ne l'a jamais mérité. » Elle frissonna, les yeux dans le vague, intégrant avec douleur ce que son subconscient tentait de lui faire entrer dans le crâne. Bien sur qu'elle ne le méritait pas. Elle le savait. Elle sursauta lorsque la porte s'ouvrit de nouveau sur l'infirmière. La femme lui offrit un sourire compatissant auquel elle répondit par une mimique forcé. Elle installa un lit non loin du sien, déblatérant un flot de parole sur combien le "beau brun qui lui servait de fiancé" était bien élevé, très mignon et incroyablement prévenant, renforçant, sans le savoir, le sentiment de culpabilité qui l'étreignait. « Excusez moi mais ... Quand pourrais-je partir ? » Sa propre voix, rauque et tremblotante, la fit sursauter à nouveau. L'infirmière la regarda avec un mélange de pitié et d'inquiétude. « Et bien, quand les médecins penseront que c'est le bon moment mademoiselle ... Au vu de la gravité de vos blessures, un mois ... » Le visage paniqué de Virginia la fit reprendre de plus belle « Mais je suis sûre qu'avec des soins plus ... de chez vous, vous vous porterez comme un charme d'ici une petite semaine. » Elle lui sourit à nouveau avant de quitter la pièce, laissant Virginia de nouveau seule. Une semaine. Une semaine pour donner le change, reprendre les bonnes vielles habitudes de jeune héritière parfaite. Une semaine pour faire croire au monde entier que tout allait bien et après...

La porte s'ouvrit de nouveau, laissant entrer Héres dans la pièce. Elle avait l'impression qu'il était partit depuis des heures. Il y avait un côté ironique à la situation: après leur petite dizaine d'années à se côtoyer et plus de cinq ans à vivre une relation plus qu'amicale, ils allaient enfin passer une nuit ensemble. Dormir dans la même pièce sans créer de scandale. Et elle ne pourrait même pas se serrer contre lui, prisonnière de ces cathéters, de ce lit d'hôpital ... « Moi qui espérais que j'allais avoir du mérite en ayant réussi à convaincre l'infirmière de rester la nuit ici... Je t'avoue que je n'ai pas du user de mon charme ! » Quelques heures plus tôt, elle aurait sans doute rit, intérieurement outrée qu'il ose utilisé cette technique pour obtenir ce qu'il désirait. Cela la mettait dans des rages folles lorsqu'elle le voyait faire ça: jalousie mal placée sans doute. Mais aujourd'hui, chaque mot menaçait de la faire craquer. Elle savait qu'il n'avait pas besoin de grand chose pour obtenir la lune: il avait une telle prestance que n'importe qui se serait plié en quatre pour exaucé le moindre de ses désirs. Héres était de ces gens qui attirent, qui convainquent sans avoir à se salir les mains, il avait un charme indéniable et une façon de voir les choses qui enchantait toujours son auditorat. C'était l'une des choses qu'elle trouvait le plus étonnant chez lui. « Je dors ici cette nuit mais je devrais repartir à la tour demain matin. Je reviendrai le soir. » Elle hocha la tête, son regard fixé sur un point invisible. « il faut que je sorte ... » Les mots lui avaient échappé. Traitres. Elle tourna ses yeux vers lui, vers la chaise sur laquelle il avait élu domicile. Comment pouvait-elle lui imposer de s'enchainer à elle ... ? Quelle égoïste faisait-elle pour profiter ainsi des sentiments qu'il avait pour elle ... La rousse secoua la tête « Désolée mais ... Je sais pas, j'étouffe ici. » Elle ignorait ce qu'elle cherchait en lui confiant cela. Qu'il l'aide peut être ? Qu'ils quittent cet endroit de malheur au plus vite ... Elle soupira et laissa l'une de ses mains retomber mollement sur le matelas.

Elle avait l'impression d'être dans un état de semi-conscience lorsque les mots d'Héres parvinrent à son oreille: il lui semblait lointain et elle ne parvenait pas à ouvrir les yeux ou à bouger. Le bruit d'une porte s'ouvrant, quelques voix discutant dans l'obscurité de ce début de matinée suivit d'un nouveau bruit de porte l'éveillèrent un peu plus. Virginia, dans son éveil comateux, prenait conscience que le grand philosophe ayant affirmé que le sommeil portait conseil s'était bien moqué d'elle. Elle avait l'impression que sa tête s'était emplies de pensées plus négative les unes que les autres, que son coeur se brisait au souvenir du regard triste d'Héres et que son corps ne lui appartenait plus. Les yeux clos, elle tenta de ressentir ce qui l'entourait, prêtant attention au toucher du tissus sur ses doigts, à l'odeur si caractéristique de l'environnement médical et à cette luminosité très étrange pour cette petite chambre où on l'avait mis. Elle trouva la force, après quelques minutes, de bouger la main pour la placer sur son ventre. Le renflement des pansements raviva la sensation de perte qu'elle ressentait et elle s'obligea à tenir le coup. Même si elle n'arrivait pas à sortir l'image de l'accident ensanglanté de son esprit, elle devait être forte. Ne serait-ce que pour Héres. Ses paupières papillonnèrent et elle ouvrit enfin les yeux. La pièce semblait différente soudainement et elle regarda tout autour d'elle avec surprise, se redressant sur le lit pour mieux voir. La petite chambre avait laissé place à une vaste pièce ouverte sur l'extérieur: elle n'avait pas l'impression d'être à l'hôpital mais en plein air comme lorsqu'elle était enfant. Elle repoussa les couvertures, s'asseyant sur le lit, les jambes dans le vide. Un médicomage avait dut venir, durant son sommeil, pour observer les dégâts et soulager la douleur. Elle voulut descendre pour aller vers la fenêtre mais les quelques fils qui la reliaient aux machines l'empêchaient de quitter sa place. Elle resta ainsi quelques instants, les yeux perdus dans le paysage matinal. La chaise avait été remplacé par un fauteuil plus confortable sur lequel se trouvait la veste d'Héres. Il avait dut rester près d'elle durant la nuit, peut être même était-il responsable de ce soudain changement. Virginia se rallongea, les yeux toujours tourné vers l'immensité de la ville.

La porte s'ouvrit de nouveau et la jeune femme aperçue la silhouette familière de son fiancé, accompagné de ce gardien qu'elle avait rencontré une fois. Elle tenta de sourire mais ne parvint qu'à esquisser une vague grimace et se ravisa. Héres semblait épuisé et la rousse ignorait si elle devait lui ordonner de rentrer dormir quelques heures ou si elle devait juste le remercier d'être resté près d'elle. Considérant qu'aucune de ses possibilités n'étaient adéquates, elle se contenta de garder le silence, Zachary semblait mal-à-l'aise et, dans la situation inverse, elle aurait ressentie la même chose. L'absence de bruit commençait à l'oppresser lorsqu'enfin le sorcier prit la parole. « Tu as une très belle vue d'ici. Ton fiancé ne manque pas d'imagination lorsqu'il s'agit de prendre soin de toi, à ce sujet tu as fait des envieuses parmi le personnel. » Ainsi c'était bien Héres qui avait organisé son changement de chambre. Elle eut un petit sourire, heureuse de ce geste qu'elle trouvait adorable venant de quelqu'un de si secret. Elle ne put empêcher le sourcil interrogateur de se soulever lorsqu'il parla d'envieuses. La rousse ne connaissait personne qui serait ravie de recevoir une plaque de taule dans le ventre mais elle se tut sur ce sujet, comprenant qu'elle n'était pas la seule à souffrir dans cette pièce et qu'il faisait avant tout cela pour leur changer les idées. « Tout le monde ne peut pas connaitre les gouts de son compagnon comme Héres connait les miens ... Mais qu'elles ne s'approchent pas trop de mon fiancé: je suis peut être clouée au lit, mais j'ai encore de la ressource ! » Elle fit mine de montrer les poings à la porte en prenant un air revêche avant de sourire. « Mais j'imagine que tu dois être impatiente de rentrer chez toi, tu sais déjà quand tu pourra quitter cet hôpital ? » Elle hocha la tête. Bien que sa sensation d'étouffement se soit apaisé, être ici rappelait à Virginia les raisons de l'accident, la mort d'un homme au service de ses parents et cette impression d'avoir déçut Héres. Elle espérait qu'en rentrant chez elle, elle pourrait effacer cette horrible journée et tout reprendre à zéro ... Ou du moins, retrouver une existence a peu près normale. « Je pense qu'on a tous envie de s'enfuir loin de cet endroit. Pour ma part, rien ne me ferait plus plaisir que de retirer tous ces câbles et de retrouver ma bonne vieille garde robe: la chemise d'hôpital jure avec mes cheveux et ne me va pas vraiment au teint. » Elle lança un regard à Héres, espérant retrouver le jeune homme qu'elle avait connu et non plus le fantôme qu'il était depuis qu'elle s'était réveillé ici.